vendredi 21 août 2020

Compte-rendu du café littéraire #45



Nous étions une dizaine de fidèles pour ce café littéraire, dont nous ignorions qu’il serait le dernier avant une long confinement. 

Catherine a emprunté à la bibliothèque Mille femmes blanches de Jim Fergus. En 1874, à Washington, le président américain Grant accepte dans le plus grand secret la proposition incroyable du chef indien Little Wolf : troquer mille femmes blanches contre chevaux et bisons pour favoriser l’intégration du peuple indien. Si quelques femmes se portent volontaires, la plupart des “Mille femmes” viennent en réalité des pénitenciers et des asiles de tous les États-Unis d’Amérique… C’est une trilogie et Catherine commence seulement le deuxième tome. Ces femmes vont très bien s’intégrer car elle découvre une autre vie avec d’autres valeurs. Elles se sentent mieux considérées dans ce contexte, dont le but est de faire des enfants avec les Indiens. Ça se lit bien, l’écriture est agréable, ça contrebalance tous les westerns que l’on a pu voir dans notre jeunesse. 

Edith nous présente un coup de cœur de Sébastien Les optimistes d’une auteure américaine Rébecca Makkai, roman qui relate l’histoire de jeunes principalement gays pris dans la tourmente du sida dans les années 80. C’est une livre très pudique, à la fois tragique, mais plein d’espoir. Edith a été très touchée par ce roman, elle a juste été gênée par quelques erreurs de traduction. Un très beau livre… Ensuite elle a eu besoin de lire un livre plus léger, un roman policier, La disparition d’Adèle Bedeau, de Greame Macrae Burnet. L’auteur s’attarde beaucoup sur la personnalité et la psychologie des deux personnages, un banquier et un inspecteur de police, et le suspense est maintenu jusqu’à la fin. 

Joël, pour la première fois parmi nous, évoque un coup de cœur qui dure depuis des années, qu’il a déjà partagé avec beaucoup de monde, il s’agit d’un livre néerlandais de Birgit Vanderbeke, Le dîner de moules, basé sur un huit-clos familial, où le retour du père est attendu, mais les heures passent, les langues se délient, et on finit par penser qu’il vaut mieux qu’il ne rentre pas. Il remet en question l'idée que l'on peut se faire, bien souvent, d'une "vraie famille" idéale. Pour ses lectures, Joël se fie aux conseils des libraires du « Quai des brumes » à Strasbourg. C’est ainsi qu’il a lu Ethan Frome d’Edith Warton, un livre dont le héros éponyme est un jeune homme pauvre qui aime les livres et rêve de voyages. Il a hérité d'une ferme et d'une scierie qui ne rapportent rien, épousé une vieille cousine hypocondriaque. Et, sans comprendre ce qui lui arrive, il tombe amoureux pour la première fois. En trois jours, sa vie va basculer. Un livre qu’on ne peut plus lâcher… Dernier coup de cœur de Joël, Opus 77, d’Alexis Ragougneau, dans ce livre on pénètre l'intimité d'une famille de musiciens dominée par le père, Claessens, chef d’orchestre et tyran domestique. Un livre dense et musical… Dans ces deux derniers livres, il a beaucoup aimé la fin. 

Martine a lu J’ai toujours cette musique dans la tête d’Agnès Martin-Lugand, et comme dans tous ses livres la fin est toujours un peu prévisible. Yanis et Véra ont la trentaine éblouissante et tout pour être heureux. Ils s'aiment comme au premier jour et sont les parents de trois magnifiques enfants. Mais la vie qui semblait devenir un rêve éveillé va soudain prendre une tournure plus sombre. Ça se lit facilement… Martine s’est régalée en lisant L’obsession Vinci de Sophie Chauveau. un roman qui révèle les facettes inédites de la personnalité du génie florentin et s'attache notamment à la source de ses obsessions artistiques, philosophiques et scientifiques. C’est drôle, bien écrit, prenant, pourtant Martine n‘est pas fan de biographie, ni de romans historiques, mais celui-ci l’a passionnée. 

Christine a apporté une série de romans de science-fiction rédigés par Victor Dixen, qui s’intitule Phobos. Malgré l’épaisseur des livres et leur nombre, elle dit les avoir lus assez vite, car c’est très prenant. Ils sont six filles et six garçons, dans les deux compartiments séparés d’un même vaisseau spatial. Ils sont les prétendants du programme « Génésis », l’émission de speed-dating la plus folle de l’histoire, destinée à créer la première colonie humaine sur Mars. Christine préfère le terme anticipation à science-fiction, car elle pense que ça pourrait se passer ainsi dans vingt ou trente ans. Ça fait un peu peur, car finalement il n’y a rien d’extraordinaire par rapport à ce qu’on vit actuellement. 

Cédric, dans le cadre du « Printemps des Poètes », commence par nous lire une très belle poésie de son cru. Puis il nous parle du livre Aux armes de Boris Marme. Une banlieue aisée, sans histoires, dans un coin d'Amérique. Wayne Chambers, la trentaine, est l'adjoint du shérif en charge de la sécurité du lycée de la ville. Alors qu’il est en train de régler des affaires sans grande importance, une tuerie éclate dans le lycée et lorsqu’il arrive, il est désemparé. C’est lui qui va devenir le monstre à la place du tueur. Le roman jette une lumière crue sur le fonctionnement d'une société victime, consommatrice et créatrice de sa violence. 

Denis nous présente une bande dessinée L’Art du chevalement de Loo Hui Phang et Philippe Dupuy, en coédition avec le Musée du Louvre-Lens. Les auteurs en sont convaincus : la construction du Louvre à Lens, sur l’ancien carreau de fosse 9 et 9 bis, en plein cœur du bassin minier du Nord-Pas-de-Calais, territoire plusieurs fois meurtri, tant par la guerre que par l’exploitation intensive du charbon, était une évidence. L’Art du chevalement est une belle réflexion sur le rôle de l’art à travers le temps. Et ce dialogue, entre les chefs d’œuvre du musée et un jeune mineur, raconte l’histoire des hommes, de leurs guerres, de leurs souffrances, de leur grandeur. C’est finalement un livre assez optimiste. 

Pour ma part, (Bernadette), je présente un livre acheté lors du festival des « Livres dans la Boucle », dont la couverture m’a tout de suite attirée. Il s’agit du premier roman écrit par une professeur de français, Alexandra Koszelyk. A crier dans les ruines raconte le retour d’une femme sur sa terre natale, vingt ans après son exil. Avec sa famille, Léna a quitté l’Ukraine en 1986 lors de la catastrophe de Tchernobyl. C’est un roman sur l’exil, la perte des repères, mais aussi la résilience : comment se reconstruit-on quand on a tout perdu ? Un livre puissant et poétique que j’ai pris un grand plaisir à lire. Autre auteur que j’aime beaucoup, Grégoire Delacourt, dont le dernier livre Mon père est sans doute le plus dramatique qu’il ait écrit. Trois jours de huis clos, dans une église saccagée par la rage d’un homme. Trois jours à interroger la justice, l’humanité, la religion. Trois jours de tête à tête entre deux pères, à libérer vérité et lâcheté, une histoire hélas très actuelle de pédophilie au sein de l’Eglise. Un livre qui nous frappe de plein fouet ! 

Christiane n’a pas eu trop le temps de lire, mais néanmoins elle a lu Sérotonine de Michel Houellebecq, qui a déjà été présenté ici. Titillée par sa fille qui pensait qu’elle n’aimerait pas ce livre, elle a quand-même voulu s’y plonger. Christiane n’a pas trop accroché durant le premier tiers puis elle s’est passionnée pour ce livre jusqu’à la fin. Bien sûr ça parle beaucoup de sexe, mais des sujets d’actualité y sont évoqués et c’est très bien écrit. Pour s’occuper dans le TGV, elle a emprunté des livres pour ados dans la bibliothèque de sa fille, et souhaite nous parler d’une collection « Des graines et des guides » aux Editions « A dos d’âne ». Une collection pour découvrir les femmes et les hommes qui ont changé le monde, porteurs d'utopie, de valeurs et d'idéaux : écrivains, activistes, peintres, intellectuels, écologistes, musiciens…  Christiane a choisi Isadora Duncan, une danseuse qui la touche, et Karen Blixen, une européenne en Afrique. 

Isabelle a emprunté à la bibliothèque un livre paru récemment Les méduses de Frédérique Clémençon. Elle a beaucoup aimé cette histoire de plusieurs personnages qui, à un moment donné, vont se retrouver liés par un lieu, en l’occurrence un hôpital de province, l’un des endroits, dans la France d’aujourd’hui, où les fragilités se rencontrent, au-delà de l’âge, de la condition sociale. Isabelle n’a pas compris le choix du titre, mais sinon c’est très bien écrit, et on n’a pas envie que le livre se termine. Elle souhaite ajouter quelques mots sur le livre de notre amie Céline Durupthy, L’air qu’elles boivent, qui relate le parcours de trois femmes fortes, féministes, lesbiennes, qui ont fait évoluer les mentalités. Le livre retrace l’histoire du féminisme depuis la guerre, les combats nécessaires pour avoir le droit d’exister en tant que femme tout simplement. Un livre qu’Isabelle nous recommande. 

Quelques jours après la Journée de la Femme, Chantal va clore la soirée avec un livre d’Edna O’Brien qui s’intitule Girl. Cette auteur de 88 ans a toujours défendu la place de la femme dans la société, ce qui lui a valu le Prix spécial du jury Fémina 2019, pour l’ensemble de son œuvre. Pour écrire ce livre, elle s’est déplacée au Nigéria pour enquêter sur l’enlèvement des lycéennes par Boko Haram. Elle se met dans la peau de l’héroïne qui va réussir à s’échapper grâce au bourreau qui lui a fait un enfant et à qui on l’a mariée de force. Un livre très dur avec des scènes de viol, de lapidation, mais qui hélas est le reflet de la réalité.

Nous vous donnons rendez-vous le mardi 22 septembre pour le 46ème café littéraire

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