lundi 7 octobre 2024

Café littéraire # 66

Nous étions une douzaine pour ce soixante-sixième café littéraire de rentrée. 

Gérard
a pris la parole pour nous parler du livre Sur les chemins noirs, d’un écrivain souvent décrié pour ses opinions, mais qui a un très beau style. Sylvain Tesson est tombé d’un toit, a été longtemps hospitalisé, et a décidé de faire sa rééducation seul en suivant les chemins noirs, ces petits chemins que l’on voit sur les cartes. C’est court, agréable à lire en été, car ça donne envie de le suivre. C’est une introspection, même si parfois des amis viennent le rejoindre, et la description des décors fait partie intégrante du livre. Gérard a eu beaucoup de plaisir à le lire. 

Régine a lu une saga, La villa aux étoffes d’Anne Jacobs. Les six volumes racontent l’histoire d’une famille d’industriels allemands de 1912 jusqu’après la deuxième guerre mondiale. On suit cette famille sur plusieurs générations, le fils épouse une servante juive, ce qui va l’obliger à partir aux Etats-Unis avec son fils musicien, avant qu’elle ne revienne vivre à Augsbourg. C’est très bien documenté au niveau historique. Régine a lu les six tomes cet été et a passé un bon moment. 

Fabienne s’excuse presque de nous présenter encore un polar, puisqu’il s’agit de Le poète de Michael Connelly. Pour résumer, l'affaire est claire pour tout le monde : Sean McEvoy, de la police de Denver, s'est suicidé d'une balle dans la tête. Pour tout le monde, sauf pour Jack, son frère jumeau. Un mot retrouvé près du cadavre le met sur la piste d'autres suicides de flics qui n'en étaient peut-être pas. Un thriller qui nous plonge dans un suspens imparable et ininterrompu. 

Pour ma part, je reviens sur deux livres qui avaient été chaudement recommandés en juin et je n’ai pas été déçue. Sur les conseils de Christine, j’ai lu Tant que le café est encore chaud de Toshikazu Kawaguchi. Ce n’est pas vraiment le genre de livre que je lis habituellement, mais je suis rentrée dedans sans problème et je me suis laissée embarquer. J’ai également lu Ceci n’est pas un fait divers de Philippe Besson, un livre magistral sur le féminicide que je recommande chaudement. Sinon je viens de lire le livre de Gaël Faye, Jacaranda, dont on parle énormément en ce moment, et qui revient sur le génocide au Rwanda. C’est très bien écrit, très pesant par moment, mais c’est magnifique. De plus j’ai pu le faire dédicacer à Besançon et l’auteur est vraiment un garçon adorable. Ceux qui ont aimé Petit pays aimeront forcément ce livre. Parions qu’il aura un prix littéraire.

Thérèse qui nous rejoint pour la première fois, est désolée de ne pas pouvoir nous montrer de livres, car elle est adepte de la liseuse. Elle nous parle cependant de La vie en fuite de John Boyne, qui avait écrit quatre ans auparavant Le garçon au pyjama rayé. Ce livre raconte une vie hantée par les traumatismes de l’enfance et de l’adolescence, l’histoire d’une femme habitée par des secrets enfouis, pourtant amenés à ressurgir à la fin de son existence. Il interroge ainsi le poids de l’Histoire et illustre la question de la responsabilité et de la culpabilité. La vie en fuite est un roman à l’intrigue haletante qu’on ne lâche pas, jusqu’à la dernière page. 

Durant les vacances, Noëlle a relu Les enfants de la Terre et Millenium, deux sagas qu’elle redécouvre toujours comme si c’était la première fois. Mais elle souhaite nous parler de Il nous restera ça de Virginie Grimaldi, un livre qui fait du bien. C’est l’histoire d’une colocation improbable entre trois personnages abîmés par la vie. Au cœur du dix-septième arrondissement de Paris se retrouvent Jeanne, 74 ans, dont la joie de vivre fout le camp après la mort subite de son mari adoré, ainsi qu’Iris, 33 ans, qui fuit son passé et se met en quête d’une nouvelle vie et puis Théo, 18 ans, qui dort dans le métro. Tous deux cherchent désespérément un endroit où se loger, et se font accueillir par Jeanne. Ensemble, ils vont devoir s’apprivoiser. Des liens se créent sous nos yeux. Avec beaucoup de sensibilité et d’humour, elle nous fait vivre un ascenseur émotionnel. Un roman qui réchauffe le cœur. 

Françoise va nous parler d’un livre publié en 1954, d’un auteur qui s’appelle Albert Cohen. Pourquoi a-t-elle choisi ce livre ? Parce qu’il y a quelques mois, elle a vu à la télévision une pièce de théâtre intitulée Le livre de ma mère, interprété par Patrick Timsit et elle a beaucoup apprécié. Ce livre bouleversant est l’évocation d’une femme à la fois ordinaire et sublime, une mère, aujourd’hui morte, qui n’a vécu que pour son fils et par son fils. Une ode à toutes les mères et à tous les fils ! Ce livre mérite d’être lu. Livre très différent La colère et l’envie d’Alice Renard, une jeune autrice de 21 ans, avec une écriture extraordinaire. Elle y fait le portrait d'une enfant qui n'entre pas dans les cases. Isor n'est pas comme les autres. Une existence en huis clos s'est construite autour de cette petite fille mutique rejetant les normes. C'est une histoire d'amour éruptive, d'émancipation et de réconciliation. Toutes les critiques sont dithyrambiques, original, à découvrir !

Martine souhaite nous présenter deux livres de Jeanne Benameur, La patience des traces, son dernier, et Les insurrections singulières, sorti en 2011. Bien qu’éloignés dans le temps, ces livres ont des points communs. Les insurrections singulières a vu le jour suite à des cafés de parole qu’elle avait animés avec des ouvriers d’Arcelor Mittal. C’est un roman intime et social, l'histoire d'un ouvrier, entre France et Brésil. Parcours de lutte et de rébellion, voyage au centre de l'héritage familial. L’autre est plutôt un roman d’introspection. On y suit Simon, un psychanalyste qui arrête son activité et décide de partir en voyage au Japon, après un évènement anodin à nos yeux mais lourd de sens pour lui : un bol brisé le matin au petit déjeuner. Après avoir passé toute sa vie à écouter les autres et les aider à se trouver ou se retrouver, il ose enfin franchir ses propres barrières et s’engager lui-même sur le chemin de la quête de soi. C’est poétique et très bien écrit. 

Armelle a apporté Boomerang de Tatiana de Rosnay, une histoire où la mort est omniprésente, sous différentes formes, autour d'un homme en pleine crise de la quarantaine qui cherche à lever le mystère qui entoure la disparation tragique de sa mère... Alors que sa sœur était sur le point de lui révéler un secret…. c’est l’accident. Elle est grièvement blessée. Seul, l’angoisse au ventre, alors qu’il attend qu’elle sorte du bloc opératoire, Antoine fait le bilan de son existence. Boomerang dose avec adresse suspense, comédie et émotion. Armelle a passé un bon moment. 

Christine nous présente un livre de Laurent Chenot, qui fait de la médecine chinoise, et qui répond à la question : comment devenir responsable de sa santé et ne plus dépendre des médecins et des médicaments ? Les 7 péchés capitaux de la diététique moderne, se résument en 7 mots : l'excès, le raffinage, la cuisson, les mélanges, les poisons chimiques, les stimulants et enfin la précipitation. Tout un programme ! Christine va nous lire ce qui lui correspond dans ce livre et conclut qu’il faut bien du courage… L’auteur dit qu’il reste beaucoup de choses à manger, même si on en supprime pas mal. C’est intéressant, mais ça demande beaucoup de sacrifices et de discipline. Avis aux courageux… 

Jeanine a lu Des diables et des saints de Jean-Baptiste Andrea, l’auteur de Veiller sur elle, souvent évoqué ici. Ce roman nous plonge dans l'enfance et l'adolescence d'un jeune garçon placé dans un orphelinat pyrénéen. On suit avec effroi sa difficile adaptation et ses relations avec certains adultes, mais on se réjouit que malgré cet environnement hostile, l’amitié puisse exister. Un roman plein de tendresse que Jeanine a adoré. Autre livre qu’elle vient de finir, Les Méditerranéennes d’Emmanuelle Ruben, qui a obtenu plusieurs prix littéraires en 2022, et qu’elle a acheté à cause de sa couverture. Un roman qui nous fait suivre Samuel à la recherche de sa famille maternelle, du récit des origines au cours d'un dîner de Hanouka jusqu'au voyage au pays. L'histoire d'une famille juive d'Algérie à travers la vie de ses femmes et les pérégrinations du chandelier qui passe de génération en génération. Un roman très exubérant, dans lequel les hommes sont pratiquement absents, une vrai leçon d’histoire, que Jeanine a lu avec énormément de plaisir. 

Cédric souhaite nous parler d'un livre de Kazuo Ishiguro, lauréat du prix Nobel de littérature en 2017. Dans Nocturnes : cinq nouvelles de musique au crépuscule, l’auteur explore l'amour et le temps qui passe à travers cinq nouvelles musicales. Un crooner prêt à tout pour un drôle de come-back, un mélomane qui tente de percer… Des amis liés par la passion d’un même genre musical, un saxophoniste en mal de reconversion ou bien encore un violoncelliste faussement naïf… Les principaux personnages de ces histoires sont en quête d’un autre mouvement à jouer dans cette symphonie si singulière qu’est la vie. Il y a une atmosphère, du suspense aussi, un certain charme suranné dans ces cinq nouvelles d'un autre temps. Cédric l’a trouvé dans la boîte à livres de Taillecourt, où l’on peut parfois faire de belles découvertes. 

Bernadette 

 Un atelier d’écriture aura lieu le Mardi 29 octobre 

 Le prochain Café littéraire aura lieu le Mardi 12 novembre

lundi 29 juillet 2024

Café littéraire # 65

Nous étions neuf lectrices assidues pour ce dernier café littéraire de la saison. 

Jeannine
a pris la parole pour nous parler de deux livres plusieurs fois évoqués ici et qu’elle a appréciés, Tout le bleu du ciel de Mélissa da Costa, malgré une invraisemblance vers la fin, ce livre lui a donné envie d’aller dans les Pyrénées, un peu à l’eau de rose, mais juste ce qu’il faut. Quant à La décision de Karine Tuil, elle a été remuée par ce livre et ce métier que finalement on ne connaît pas. Son chouchou du moment Jacky Schwartzmann a sorti une BD, dont il a écrit le scénario avec Sylvain Vallée qui l’a illustrée. C’est de la même veine que ses romans, un homme en cavale, des mafieux à sa recherche et une paroisse comme planque idéale… tel est le programme d’Habemus Bastard, nouvelle bande dessinée, qui joue avec les genres entre polar, humour et satire. Les illustrations sont belles et le fait que ça se passe à Saint-Claude dans le Jura a plu à Jeannine, qui trouve qu’il y a beaucoup de finesse dans cet ouvrage. Elle souhaite encore nous parler d’un magazine féministe auquel elle est abonnée, qui s'appelle Clara, qui paraît six fois par an, et qui traite de culture, de sport, de sciences, par rapport à la place de la femme dans tout ça, très intéressant… 

Christine a apporté deux livres, Le couteau de Salman Rushdie, qu’elle a lu par curiosité, n’ayant jamais rien lu de cet auteur. Il s’agit essentiellement de la tentative d’assassinat qu’il a subie, il revient aussi sur des événements de sa vie, c’est donc autobiographique. C’est facile à lire, bien écrit, et on se rend compte que pour quelques chapitres qui n’ont pas plu dans Les versets sataniques, il l’a payé pour le reste de sa vie. Le Couteau se lit aussi comme une réflexion puissante, intime et finalement porteuse d’espoir sur la vie, l’amour et le pouvoir de la littérature. C’est également une ode à la création artistique comme espace de liberté absolue. Le deuxième livre est très original, un peu fantastique, traduit du japonais. Tant que le café est encore chaud de Toshikazu Kawaguchi raconte un huis-clos dans un café au Japon, où l’on a la possibilité de retourner dans le passé . Mais ce voyage comporte des règles : il ne changera pas le présent et dure tant que le café est encore chaud. Ce sont toujours les mêmes personnes, le même serveur, qui sont présents et ce délicat roman introspectif est aussi une belle réflexion sur le temps qui passe, il s’en dégage une douce philosophie qui nous incite à vivre pleinement le présent. Christine a été émue par ce livre, son atmosphère dépaysante, il fait partie des livres qu’elle gardera dans sa bibliothèque. 

Chantal, qui aime beaucoup David Vann , est tombée sur ce roman qui n’est pas très récent, et qui s’intitule Aquarium. Elle en a déjà lu trois de cet auteur, ça se passe parfois en Alaska ; là où il est né, souvent dans des milieux assez hostiles. Celui-ci se passe à Seattle, où Caitlin, 12 ans, vit avec sa mère dans un modeste appartement. Pour échapper à son quotidien, elle visite chaque soir un aquarium, où elle se lie peu à peu d'amitié avec un vieil homme. Un jour, elle découvre que sa mère le connaît et qu'un lien secret les unit. Ca va devenir un cauchemar, avec malgré tout l’idée d’un pardon, d’une résilience. L’écriture est très riche, mais il faut s’y habituer, car les dialogues sont insérés dans le texte, sans tirets. Un roman très dur, comme Chantal les aime, mais qui intrigue, alors pourquoi pas ? Passons à Vivre vite de Brigitte Giraud, prix Goncourt 2022. En 1999, l’auteur s’apprêtait avec son conjoint à acheter la maison de leur rêve à Lyon, lorsque celui-ci emprunte une moto très puissante pour aller au travail, et se tue. Elle va néanmoins y emménager avec son fils. Vingt ans plus tard, des immeubles vont envahir le quartier, et la maison va être rasée. Avant de quitter cette maison, elle revient sur cet accident, sous forme de vingt-trois chapitres, commençant par et si ... et si…, et si… , pour tenter de donner un sens à cette mort absurde, d’ailleurs Vivre vite est un titre emprunté à Lou Reed, l’un des musiciens préférés de Claude, son compagnon. Une histoire personnelle très touchante. 

C’est au tour de Catherine de nous parler d’un polar qui fait partir d’une trilogie de Nicolas Lebel. Le premier L’heure des fous, elle ne l’avait pas trouvé très bien, par contre celui-là Le jour des morts, elle l’a beaucoup aimé. Il y a un capitaine qui est génial, en résumé, on est à Paris à la Toussaint, le capitaine Mehrlicht et ses acolytes sont appelés à l’hôpital Saint-Antoine : un patient vient d’y être empoisonné. Les victimes se succèdent, la France prend peur, qui est cette jeune femme d’une trentaine d’années que de nombreux témoins ont croisée ? Comment peut-elle tuer depuis quarante ans et en paraître trente ? Surtout, qui sera sa prochaine victime ? Catherine nous lit deux passages qu’elle a adorés. C’est policier, mais ça parle aussi des travers de la société, c’est très bien ! Un petit mot pour dire que Catherine a lu Veiller sur elle, et que comme les autres lectrices, elle a beaucoup aimé. 

Pour ne pas faillir à la tradition, Fabienne nous a apporté un thriller, La femme parfaite de J.P. Delaney. Abbie est amnésique lorsqu'elle se réveille à l'hôpital. L'homme à son chevet prétend être son mari. Fondateur d'une start-up innovante de la Silicon Valley, il lui apprend qu'elle est artiste et mère d'un petit garçon. Cinq ans auparavant, la jeune femme a eu un grave accident et les innovations dans le domaine de l'intelligence artificielle ont permis son retour à la vie, dans un corps de robot. L'auteur aborde aussi les thèmes de l'intelligence artificielle et de l'utilisation des robots dans l'amélioration de notre vie quotidienne. Un thriller psychologique bien construit, un roman surprenant, qui nous emmène de surprise en surprise, un roman particulier que Fabienne a apprécié, même si certaines d’entre nous restent sceptiques face au sujet. 

Martine va reparler brièvement de Nicolas Lebel, et particulièrement d’une trilogie comprenant La capture, Le Gibier, et enfin L’hallali dont elle va nous parler. C’est plein de ressources, de rebondissements, Yvonne Chen n’a pas d’amis et elle n’en veut pas : ils l’ennuient ou finissent par mourir. Lorsque, en ce 5 janvier, son téléphone sonne, elle sait donc que ce n’est pas un ami qui l’appelle. Les Furies, ces tueurs à gages sans foi ni loi, sont de retour et leur chef Alecto propose à Chen de participer à l’une de leurs danses… Deux frères se disputent le contrôle d’un prestigieux vignoble dans les Vosges et, d’après le commanditaire anonyme, il ne doit en rester qu’un. On ne s’ennuie pas du début à la fin. Puis Martine a lu Python de Nathalie Azoulai, auteur dont elle avait déjà présenté La fille parfaite, qu’elle avait beaucoup aimé. Dans ce livre ce qui l’a intéressée, c’est le titre car dans ses dernières années d’enseignement, Martine a dû se mettre à Python, qui est un langage codé pour écrire des algorithmes. Ce roman (mais est-ce vraiment un roman ?) montre Boris qui a « passé la nuit à coder ». Il ne déjeunera pas avec son père, Pierre, et ses invités. Parmi eux, la narratrice, qui le regarde, les écouteurs sur les oreilles, taper sur son clavier inlassablement. Retranché du monde, il semble « garder jalousement un trésor ». Un jeune homme qui « aurait pu avoir dansé, bu ou baisé toute la nuit » est resté chez lui, à « coder ». Quelle est la puissance de ce code qui aspire la vitalité de millions d’obsessionnels ? La question va faire basculer la vie de la narratrice, la jeter dans un monde à mille lieues du sien, et pourtant si proche. Martine a appris beaucoup de choses sur Python, mais elle trouve qu’à la fin ça devient un peu glauque. Elle l’a lu jusqu’au bout, mais a été fatiguée par toutes les références cinématographiques, littéraires et scientifiques qui l’ont obligée à faire des arrêts pour se documenter. Elle a peine à croire à cette histoire, pas convaincue donc… Par contre elle a adoré Philippe Besson et son livre Ceci n’est pas un fait divers. Un tout petit livre qu’on lit presque en une fois. L’auteur se penche avec humanité et sensibilité sur le sujet des féminicides. L’histoire est inspirée d’un fait réel. Un mari qui tue son épouse (17 coups de couteau) avant de prendre la fuite, alors qu’elle s’apprêtait à le quitter après des années de violences et d’humiliations  et la fille qui entend tout. C’est finement écrit, on sait qu’il y a de l’espoir, mais que ce sera difficile, à lire absolument… 

Sur les conseils de Gérard, j’ai lu Le roman de Jim, que j’ai beaucoup aimé, j’attends le film avec impatience, et sur les conseils de Françoise, j’ai lu Meccano, qu’elle n’avait pas lu jusqu’au bout. Ce n’est pas un livre facile, car la première partie est très technique, j’ai préféré la deuxième partie, j’ai appris beaucoup de choses sur les trains, et la façon dont c’est écrit est originale, puisque c’est comme de la poésie, sans les rimes, mais il va à la ligne au milieu des phrases. Un livre hors du commun ! Mais je souhaite présenter Ne réveille pas les enfants d’Ariane Chemin, sur un fait divers de 2022 qui m’avait marquée. Le 24 mars 2022 une famille française se jette du septième étage de son balcon, face au lac Léman, à Montreux, en Suisse. “Suicide collectif”, concluent presque aussitôt les enquêteurs, malgré la présence de deux enfants mineurs. Un an plus tard, le dossier est clos. La journaliste établit avec justesse des liens entre cet événement, réduit par la justice suisse et la presse à une banale histoire de complotistes à tendance survivaliste, et des faits tout aussi dramatiques qui se sont déroulés en Algérie le 15 mars 1962, quelques jours avant les accords d’Évian. Une enquête sur une affaire qui a défrayé la chronique mais de laquelle finalement on sait peu de choses. 

Nous terminons avec Françoise qui nous présente un livre différent, puisqu’il s’agit d’un livre de cuisine, Ayurveda cuisine pour tous les jours, d’Archcena Nagalingam. Un livre qui présente les principes de l’ayurveda et bien entendu des recettes. Pour rappel, la cuisine ayurvédique est une manière de prévenir et guérir des maladies tout en prenant plaisir à manger. Savoir quoi manger en fonction de sa constitution n'est pas toujours facile, et les livres semblent être remplis de concepts complexes et de longues explications érudites. Dans ce livre, on découvre des principes simples et ludiques et plus de 80 recettes végétales pour mieux manger. Il y a trois types de profils, les trois doshas qui sont Vata, Pitta et Kapha. Grâce à un questionnaire, Françoise s’est totalement retrouvée dans Kapha. L'Ayurveda est une médecine ancestrale, mais aussi une philosophie et un véritable mode de vie qui s'occupe du bien-être de l'être humain dans sa globalité. Elle a testé certaines recettes qui sont très bonnes. C’est une cuisine végétarienne évidemment. Un très beau livre dans lequel il faut se plonger…

Puisque nous sommes en été, nous terminons la séance avec une dégustation des délicieuses glaces de Nanou. Bonnes vacances et belles lectures à tous. 

Bernadette

 Le prochain Café littéraire aura lieu le mardi 24 septembre.
 Il sera précédé de l’Assemblée Générale.

lundi 29 avril 2024

Café littéraire # 64

Une bonne douzaine de lectrices et un lecteur se sont retrouvés pour ce 64ème Café littéraire. Des livres divers et variés ont été présentés par chacun. 

Catherine
a pris la parole pour nous parler d’un livre plusieurs fois évoqué ici et qui fait l’unanimité, La carte postale d’Anne Berest. Un roman qu’elle est en train de lire et qu’elle trouve très prenant. Dans ce roman d'enquête, Prix Renaudot des lycéens 2021, l’auteur remonte son passé familial pour en retracer l'histoire marquée par la Shoah. Un beau témoignage de notre histoire. Elle a lu également le premier roman d’Emmanuel-Robert Espalieu, intitulé Fleur de sang. Fin du XVIIe siècle, en s'éprenant de Marguerite, fille unique de l'exécuteur des hautes oeuvres pour la ville de Joigny, Charles a tout perdu : son grade de lieutenant dans l'armée du Roi-Soleil, son titre de comte, et surtout l'amour et l'estime de son père. Une fille de bourreau ne pouvant convoler qu'avec un autre bourreau, Charles doit aussi apprendre les macabres ficelles de ce métier si redouté qui le condamne à vivre au banc de la société. Mais, comme pour conjurer la mort qui partout les suit, les bourreaux ont développé le précieux savoir des guérisseurs. Un livre prêté par une amie, qui rebutait Catherine, et qui finalement l’a embarquée, un formidable roman historique doublé d'une histoire d'amour particulièrement poignante. Une héroïne forte, qui se battra jusqu'au bout pour sauver celui qu'elle aime envers et contre tous. Elle nous le recommande chaudement… 

Armelle a apporté le dernier roman de David Foenkinos, La vie heureuse. La vie est parfois pleine de surprises, bonnes comme mauvaises. Notre héros quadragénaire en est la preuve. En acceptant la proposition étonnante d’Amélie de rejoindre son équipe, Eric n’imagine pas le tournant qu’il prendra bientôt. C’est lors d’un voyage à Séoul début 2020 qu’une expérience unique va le transformer à jamais… Un roman dans l’air du temps qui évoque le désir de changer de vie. L’auteur, témoin clairvoyant de notre époque, l’a bien compris depuis le Covid : hier, les nouvelles générations voulaient de l’argent, aujourd’hui, elles veulent du temps. Encore un bon livre de Foenkinos à savourer. 

Gérard nous signale que Le roman de Jim, dont il nous a chaudement parlé la dernière fois, fait l’objet d’un film, qui sera projeté au Festival de Cannes, raison supplémentaire pour le lire. Sinon il a lu La décision de Karine Tuil, un roman déjà présenté ici en 2022. Dans une aile ultrasécurisée du Palais de justice, la juge Alma Revel doit se prononcer sur le sort d'un jeune homme suspecté d'avoir rejoint l'État islamique en Syrie. En résumé, des conflits de loyauté pour cette juge dans sa vie professionnelle comme dans sa vie personnelle. C’est très bien écrit, on a l’impression d’être dans le cabinet du juge. Dans le cadre du Club de lecture Simone Veil, Gérard a lu Automobile club d’Egypte d’Alaa El Aswany, première fois qu’il lit un auteur arabe. Il pensait ne pas pouvoir arriver au bout mais après une vingtaine de pages, on est vraiment dans l’histoire. L’auteur choisit de décrire un microcosme, soit l’Automobile Club d’Egypte.. On est en 1947 avant l’arrivée de Nasser au pouvoir. Ce vénérable cercle privé très sélect a réellement existé et a connu son heure de gloire au temps du dernier roi d’Egypte, le roi Farouk.  Tous ces personnages se croisent, s’aiment ou s’affrontent en un ballet incessant. Des destins croisés, une fresque historique qui permettent aussi de comprendre l’Égypte actuelle . Très intéressant ! 

Régine a lu il y a longtemps Liv Maria de Julia Kerninon. Elle se souvient avoir tellement aimé ce livre qu’elle l’a offert plusieurs fois, mais elle ne peut pas nous en dire beaucoup plus. J’ai donc cherché sur le net un petit résumé : enfant solitaire, née des amours étonnantes d'un père suédois et d'une mère à l'esprit rebelle, Liv Maria devra, pour fuir la violence des hommes, s'exiler à Berlin où elle rencontrera son premier amour, un professeur d'anglais, qui marquera à jamais son corps et son âme. Dans les pas de Liv Maria, l’auteure nous fait naviguer entre liberté, identité et féminité, se demandant comment rester une femme libre lorsque l’on a tant vécu, lorsque l’on devient épouse et mère. Ça donne envie de le lire… 

Christine a suivi les recommandations de Gérard et a demandé au libraire un livre de Pierric Bailly. Elle est repartie avec L’homme des bois. A 61 ans, dans une forêt du Jura, Christian Bailly a chuté dans le vide. On l'a retrouvé trois jours plus tard, mort. Son fils, l’auteur, a mené l'enquête, pour lui dire adieu. Ce n’est n’est pas seulement le récit par son fils de la mort brutale et mystérieuse d’un père. C’est aussi une évocation de la vie dans les campagnes française à notre époque, l’histoire d’une émancipation, d’un destin modeste, intègre et singulier. C’est enfin le portrait d’une génération, celle des parents du narrateur, travailleurs sociaux, militants politiques et associatifs en milieu rural. Christine a trouvé ce livre très émouvant, elle a eu l’impression d’un fils qui essaie de renouer les liens avec un père, dont il n’était pas vraiment proche. Ca se passe dans le Jura, et elle aime quand elle reconnaît les lieux. Christine écoute France-Culture, où Georges Pérec est décrit comme un génie de la littérature. Elle a donc voulu tester avec La vie mode d’emploi, celui paraît-il qu’il faut lire quand on n’en a pas lu d’autres. Dans les presque six cents pages de ce roman, le narrateur décrit la situation d'un immeuble à un instant donné, le 23 juin 1975, alors qu'il est presque huit heures de soir. Comme si la façade avait été enlevée, nous sont dépeints tous les décors, tous les gens qui sont dans l'immeuble et leur occupation. Parfois, nous est racontée leur histoire, celle de leur famille. Pour Christine ça s’est compliqué, car il présente par exemple Le 2ème B, le 3ème C, puis il revient en arrière, il faut sans cesse rechercher de qui il parle, Elle a renoncé. C’est peut-être dommage, car ce livre est décrit comme un chef-d’oeuvre… 

Fabienne, toujours adepte de romans policiers, a apporté Douze ans, sept mois et onze jours de Lorris Murail. Une cabane perdue dans les forêts du Maine, aux USA. C'est là que Walden est abandonné par son père. À partir de maintenant, le garçon va devoir se débrouiller pour survivre dans les bois. Avec pour seule richesse quelques boîtes de conserve, un livre sur la nature et une carabine. À la fin de chaque journée, Walden note son âge sur une écorce de rondin. Douze ans, sept mois et quatre jours, au moment où commence son apprentissage pour le moins étrange… On ne sait pas pour quelle raison le père l’abandonne là, c’est intéressant car le père comme le fils vont se poser beaucoup de questions. Un vrai thriller, bien ficelé et bien écrit, destiné à la base à la jeunesse, mais qui plaît aussi aux adultes. 

Françoise nous propose de nous parler de deux livres qu’elle n’a pas, car elle les a rendus à sa fille, mais elle pense qu’ils ont le mérite d’être lus. Le premier, Journal pauvre de Frédérique Germanaud relate une expérience personnelle. Elle avait une bonne situation dans l’industrie, elle décide de tout abandonner pour écrire .Pendant une année sabbatique, de juillet 2015 à juillet 2016, Journal pauvre interroge ce qu'est subsister sans salaire et se consacrer à l'écriture. Cueillette, glanage, troc, affût des bonnes occasions : une économie de la main à la main s’organise, pour que vivre ne soit pas seulement survivre et que cette expérience de pauvreté soit libre et sereine. Ce journal à durée limitée s’achève sur la décision de quitter définitivement le monde du travail salarié et un modèle économique imposé, ouvrant ainsi sur la possibilité de renouveler ce qui fut au départ une tentative d’habiter autrement le monde. Un petit livre très agréable à lire, dans lequel on se rend compte que finalement tous les objets auxquels nous sommes si attachés ne sont pas si utiles que ça. Le deuxième livre s’appelle Mécano de Mattia Filice, présenté à la Grande Librairie il y a quelques mois. L’auteur transforme son expérience de conducteur de train en une grande fresque épique, dans un premier roman inattendu, avec une écriture très originale. Sa fille a adoré, mais Françoise en a lu les trois-quarts, car c’est quand-même très technique. Technique et poésie se mélangent et c’est à découvrir malgré tout ! 

Jeanine a eu la chance de visiter la Cité de la BD à Bruxelles, et en traversant la boutique, elle est tombée en arrêt devant un livre de Zeïna Abirached, Le piano oriental, entre la BD et le roman graphique avec des illustrations magnifiques. Un récit inspiré de la vie d'un ancêtre, inventeur d'un nouvel instrument de musique dans le Beyrouth des années 1960. Folle tentative pour rapprocher les traditions musicales d'Orient de d'Occident, ce piano au destin méconnu n'aura vu le jour qu'en un seul exemplaire, juste avant que la guerre civile ne s'abatte sur le Liban. Une métaphore amusante et touchante de la rencontre de deux cultures, de deux mondes, qui cohabitent chez Zeina et dans son œuvre. Jeanine, qui d’ordinaire lit peu de BD a été emballée par ce livre. Ensuite elle a visité le Musée Soulages à Rodez et en passant par la boutique, où l’on trouve tout ce qui parle de noir, elle tombe sur un autre livre de Zina Abouchareb, Mourir partir revenir le jeu des hirondelles. Le livre retrace un moment de la jeunesse de l'auteur, à Beyrouth, et plus spécialement dans leur immeuble d'où ils ne pouvaient quasiment pas sortir, pendant la guerre dans les années 80. Elle vient juste de le commencer, en tout cas une belle découverte… 

Noëlle que l’on retrouve après une longue absence a relu deux livres qu’elle avait aimés. Elle vu une émission à la télévision sur nos très très lointains aïeux qui étaient partis en Asie, et ça lui a donné envie de relire Le clan de l’ours des cavernes de Jean M. Auel, le premier livre de la saga Les enfants de la terre. Quelque part en Europe, 35 000 ans avant notre ère, petite fille Cro-Magnon de cinq ans, Ayla est séparée de ses parents à la suite d'un violent tremblement de terre. Elle est recueillie par le clan de l'ours des cavernes, une tribu Neandertal qui l'adopte, non sans réticence, ayant reconnu en elle la représentante d'une autre espèce, plus évoluée. C’est très bien écrit, très documenté, il y en a 7, mais ça se lit très facilement. Autre série dont souhaite nous parler Noëlle, Millénium, les trois premiers ont été écrits par Stieg Larsson, qui est décédé à l’âge de 50 ans, les trois suivants par David Lagercrantz, et le septième par Karine Smirnoff. Elle nous a apporté le sixième intitulé La fille qui devait mourir, À Stockholm, un SDF est retrouvé mort dans un parc du centre-ville, certains de ses doigts et orteils amputés. Dans les semaines précédant sa mort, on l’avait entendu divaguer au sujet de Johannes Forsell, le ministre de la Défense suédois. S’agissait-il des délires d’un déséquilibré ou y avait-il un véritable lien entre ces deux hommes ? Michael Blomqvist a besoin de l’aide de Lisbeth Salander. Mais cette dernière se trouve à Moscou, où elle a l’intention de régler ses comptes avec sa sœur Camilla. C’est un peu gore, mais Il y a quand-même une morale dans toutes ces livres. L’histoire lui a plu, mais le style de l’auteur beaucoup moins. 

Pour ma part, j’ai apporté un très beau livre Les yeux de Mona, écrit par Thomas Schlesser, un historien de l’art, que j’ai découvert à la Grande Librairie, le livre est déjà un best-seller dans le monde entier. Cinquante-deux semaines : c'est le temps qu'il reste à Mona pour découvrir toute la beauté du monde. C'est le temps que s'est donné son grand-père, un homme érudit et fantasque, pour l'initier, chaque mercredi après l'école, à une œuvre d'art, avant qu'elle ne perde, peut-être pour toujours, l'usage de ses yeux. Ensemble, ils vont sillonner le Louvre, Orsay et Beaubourg. Et l’on retrouve les 52 chefs-d'œuvre à l'intérieur de la jaquette dépliable. Pour apprécier, il faut bien sûr s’intéresser un minimum à l’art, mais la relation entre cette petite-fille et son grand-père est très émouvante et on apprend beaucoup de choses sur les œuvres décrites. Vraiment passionnant ! Lorsque je suis allée acheter ce livre, j’ai vu qu’Olivier Bourdeaut, un auteur que j’affectionne, avait écrit un quatrième roman que je me suis empressée d’acheter. Après En attendant Bojangles, Pactum Salis et Florida, voici Développement personnel. En panne d’inspiration pour ce roman, l’auteur loue une maisonnette à Ibiza pour se concentrer sur l’écriture, et finalement il va nous raconter sa vie, avec beaucoup d’autodérision. Il revient sur son enfance compliquée, sa courte et chaotique scolarité et le périlleux apprentissage du métier d’écrivain. C’est à la fois drôle et émouvant, je n’ai pas été déçue. 

Et honneur à nouveau à Pierric Bailly dont Martine a lu le dernier livre La foudre, qui fait d’ailleurs partie de la sélection du Livre Inter. C’est l'histoire d'un berger du Haut-Jura, prêt à partir s'installer avec sa compagne à la Réunion. Parallèlement, il retrouve la femme d'un ex-ami emprisonné pour meurtre, en attente de son procès en assises. Foudroyé par un amour passionnel, et hésitant sur la suite à donner à sa vie, il tente un temps de vivre avec l'une et avec l'autre avant de faire un choix. Martine a aimé la lenteur de ce roman et les lieux qu’elle connaît, dans lesquels elle pouvait se projeter. Elle s’attendait à un coup de foudre, puisque c’est le titre, mais ce n’est pas le cas, la foudre arrive dans les dernières pages et dans la dernière phrase où le héros dit « Je me lève, j’attends la foudre ». Si vous voulez en savoir plus, il faut le lire. 

Nous terminons avec Rosemay qui nous présente un livre de Lucinda Riley, faisant partie d’une saga de 7 livres, Les sept sœurs, elle adore prendre un livre et être tout de suite transportée, et là c’est le cas. À la mort de leur père, énigmatique milliardaire qui les a ramenées des quatre coins du monde et adoptées lorsqu’elles étaient bébés, Maia d’Aplièse et ses sœurs se retrouvent dans la maison de leur enfance, Atlantis, un magnifique château sur les bords du lac de Genève. Pour héritage, elles reçoivent chacune un mystérieux indice qui leur permettra peut-être de percer le secret de leurs origines. Maia est le premier tome de la série, la piste de Maia la conduit au-delà des océans, dans un manoir en ruines sur les collines de Rio de Janeiro. C’est là que son histoire a commencé… Secrets enfouis et destins brisés : ce que Maia découvre va bouleverser sa vie. Donc il y a un roman pour chacune des filles, c’est bien traduit et très prenant. Autre lecture appréciée par Rosemay, La fille sans nom de J.S. Monroe, un livre qu’elle a acquis par un échange dans une bourse. Une femme arrive chez Tony et Laura, certaine de rentrer chez elle. Celle-ci ne se rappelle plus de rien hormis cette adresse. Le couple décide de s'en occuper et la surnomme Jemma. Ils l'emmènent chez leur médecin qui se souvient de l'avoir déjà vue mais sans pouvoir se rappeler dans quelles circonstances. Tony et Laura se demandent si l'inconnue ne serait pas en fuite et simulerait son amnésie. Tout au long du livre, on se crée divers dénouements, qui évoluent au fil de la lecture. Un très bon livre plein de suspense, dans le lequel on ne s’ennuie pas une seconde.

Bernadette 

Prochain atelier d’écriture : Mardi 14 mai 2024 

Prochain Café littéraire : Mercredi 19 juin 2024

dimanche 17 mars 2024

Café littéraire # 63

Quelques absentes pour ce 63ème Café littéraire. Mais nous avons eu le plaisir d’accueillir Régine et Gérard, un couple de lecteurs venus grossir nos rangs. Bienvenue à eux ! 

Christine
a pris la parole pour nous présenter deux livres. Tout d’abord Fabriquer une femme, dernier livre de Marie Darrieussecq, et même si Christine a déjà lu plusieurs de ses ouvrages, elle n’aime pas vraiment son écriture. Ce roman raconte l’entrée dans la vie adulte de deux amies adolescentes, Solange et Rose. Nous sommes dans les années 80, en province dans le Pays basque, à Bordeaux, puis à Paris. Deux destins à la fois liés et différents, qui permettent à l’auteur au-delà de cette histoire, de parler de la condition féminine dans tous ces aspects, mais ce n’est pas un manifeste féministe non plus ! Christine, hormis le style, a néanmoins trouvé ce livre intéressant et a été émue par certains passages. C’est un peu triste, désespérant par moment, mais il faut le lire. Dans un tout autre registre, un livre plutôt distrayant, Le temps des loups d’Olivier Maulin. Pour résumer, trois frères vivent dans une ferme délabrée dans les Vosges, un seul travaille pendant que les deux autres glandouillent. Quand ces deux derniers montent le projet de kidnapper une américaine, célèbre écrivain, le troisième frère sera malgré tout présent au cas où cela tourne mal. Et rien ne se passera comme prévu ! Christine a passé un bon moment, et elle aime quand ça se déroule dans des lieux qu’elle connaît. Un roman à décou­vrir pour un humour omni­pré­sent et pour ses intrigues éton­nantes. 

Françoise a lu Mes pas dans leurs ombres de Lionel Duroy. Elle l’a emprunté à Chantal qui nous l’avait présenté il y a quelques mois. Françoise est très attachée à ce qui touche à la Roumanie, elle a été bouleversée par ce roman construit comme une enquête sur les rafles et la collaboration en Roumanie au début de la 2ème guerre mondiale. Elle nous présente également Vivre avec nos morts de Delphine Horvilleur, femme rabbin et écrivaine, souvent confrontée à la mort et qui essaie de transmuer cette mort en leçon de vie pour ceux qui restent. Elle conte, à travers onze chapitres, la manière dont on donne un sens à la mort à travers la parole. Ce n’est ni morbide, ni déstabilisant, c’est vivre la mort en lui donnant un sens. Plusieurs aspects sont évoqués, les histoires des gens qui meurent avec de grands noms comme Simone Veil ou Marceline Loridan, elle y associe les textes sacrés et le conte. Françoise trouve que c’est remarquablement écrit par une fille qui doit être très intelligente. Elle nous parle des journées interreligiosités auxquelles elle a assisté, bien que n’étant pas croyante, elle s’intéresse à l’histoire des religions. C’était passionnant ! 

Gérard a apporté deux livres, le premier il l’a lu dans le cadre du Club de lecture du Centre Simone Veil, où les livres sont imposés, ce qui permet de lire des livres qu’on n’aurait peut-être pas lus autrement. Il s’agit d’un livre de Walker Hamilton, un auteur écossais décédé en 1969. Tous les petits animaux raconte l’histoire de Bobby qui a trente et un ans, mais qui a gardé la naïveté et les réactions d'un petit garçon. Sa mère est morte. Fuyant la cruauté de son beau-père « le Gros », il se retrouve seul sur les routes. Il y rencontrera M. Summers, un vieil homme solitaire, meurtrier impuni, dont l'étrange métier est d'enterrer « tous les petits animaux »… À eux deux ils formeront la plus inattendue des paires, capable du meilleur comme du pire. Ce roman plein d'humanité aborde, mine de rien, tous les grands sujets comme le droit à la différence, la pédophilie, l'écologie, la souffrance animale, l'avenir de l'homme ou encore la violence de nos sociétés, autant de sujets dont on ne parlait pas à la sortie du livre. Un style percutant, des dialogues vifs et efficaces, un petit livre qui se lit très rapidement, mais qui a laissé Gérard perplexe, quant à la véritable intention de l’auteur. Passons au coup de cœur de Gérard, Le roman de Jim de Pierric Bailly, un auteur né à Champagnole en 1982. Son avant-dernier roman évoque avec une grande beauté une forme d’attachement, hors des liens du sang. Aymeric, le beau-père de Jim, a rencontré Florence, sa mère, alors qu’elle était enceinte de six mois. Tous les trois mènent une vie heureuse dans le Jura jusqu’à ce que le père biologique, Christophe, revienne suite à une tragédie personnelle. Gérard qui est un adepte de Bernard Clavel a retrouvé chez cet écrivain la même façon d’écrire. Un auteur à suivre… 

Régine n’a pas apporté de livre, ce sera pour la prochaine fois. 

C’est donc à mon tour de présenter L’empire du froid de François Garde, un livre que j’avais mis sur ma liste avant de me rendre aux « Livres dans la boucle », sans savoir si j’allais l’acheter, mais l’auteur a su me convaincre. C’est donc au travers d’une compilation de 99 textes (classés par ordre alphabétique), à la fois insolites, instructifs et emplis d’humour, que François Garde nous livre ses perceptions du froid. Il y mêle les histoires des premières explorations vers les pôles, des aventures menées vers les plus hautes altitudes, mais aussi des anecdotes autour de notre perception quotidienne du froid. Des récits à frissonner, à savourer au coin du feu. C’est extrêmement varié, puisque tous les thèmes y sont abordés, que ce soit l’histoire, la géographie, les sciences, la gastronomie, la philosophie et j’en passe. J’y ai appris beaucoup de choses, d’ailleurs je vais partager quelques passages en les lisant, comme la recette du pemmican, l’agression du froid lors de la naissance, ou l’éruption volcanique en 1783 d’un volcan islandais qui avait modifié le climat pendant une bonne année, provoquant famines et intoxications dans toute l’Europe. En conclusion et de façon humoristique, il dit qu’il vaudrait mieux se battre pour le froid, que contre le réchauffement climatique, ce serait plus positif. 

Armelle, qui était venue en observatrice la première fois, avait promis d’apporter un livre. Ce sont deux livres dont elle souhaite nous parler ce soir, tout d’abord Kilomètre zéro de Maud Ankaoua. Un livre de développement personnel, des leçons de vie, en résumé Maëlle est directrice financière dans une start-up en pleine expansion. Elle mène une vie bien rodée jusqu’au moment où sa meilleure amie lui demande un immense service. Une question de vie ou de mort…  Maëlle accepte la mission et se rend au Népal où elle doit prendre possession d’un document qui permettra à son amie de guérir. Au cours d’expériences et de rencontres bouleversantes, Maëlle va apprendre les secrets du bonheur profond et transformer sa vie. Mais réussira-t-elle à sauver son amie ? Armelle nous avoue ensuite être allée à la librairie et avoir demandé un petit livre qu’elle pourrait présenter au Café littéraire. La libraire lui a conseillé un premier roman J’ai huit ans et je m’appelle Jean Rochefort d’Adèle Fugère, en lui disant qu’elle allait sourire. Rosalie Pierredoux, 8 ans, sent toute la tristesse du monde peser sur ses épaules. Un matin, sans prévenir, Jean Rochefort et sa moustache vont changer son regard. Poétique, inventif, drôle, c’est inclassable, ça se lit en une heure et ça fait du bien ! 

Nous terminerons avec Isabelle qui a apporté La commode aux tiroirs de couleurs, dont j’ai peut-être déjà parlé, mais il y a quelques années. C’est le premier roman de la chanteuse Olivia Ruiz, qui a tous les talents, elle chante, danse et maintenant écrit. À la mort de sa grand-mère, une jeune femme hérite de l’intrigante commode qui a nourri tous ses fantasmes de petite fille. Le temps d’une nuit, elle va ouvrir ses dix tiroirs et dérouler le fil de la vie de Rita, son Abuela, dévoilant les secrets qui ont scellé le destin de quatre générations de femmes indomptables, entre Espagne et France, de la dictature franquiste à nos jours. C’est autobiographique, mais un peu romancé aussi car il y a eu des secrets. Isabelle trouve que c’est bien écrit, c’est prenant, ça parle de la condition des femmes et des immigrés. Les lieux, les époques, ainsi que l’Histoire, omniprésente, constituent le point fort du roman. Ils donnent une crédibilité aux drames que vit cette famille. En conclusion, un très bon roman. 

Bernadette

Le prochain Café littéraire se déroulera le Mardi 23 avril.

lundi 29 janvier 2024

Café littéraire # 62

La météo nous ayant laissé un bref répit, ce sont neuf lectrices assidues qui se sont retrouvées pour ce 62ème Café littéraire. Nous avions quelques absentes qui n’étaient pas disponibles le mercredi, mais nous avons accueilli pour la première fois Armelle. 

Catherine nous présente Sa préférée de Sarah Jollien-Fardel, un premier roman, cadeau de son mari. Dans ce village haut perché des montagnes valaisannes, tout se sait, et personne ne dit rien. Jeanne, la narratrice, apprend tôt à esquiver la brutalité perverse de son père. Dès lors, la haine de son père et le dégoût face à tant de lâcheté vont servir de viatique à Jeanne. Dans une langue âpre, syncopée, Sarah Jollien-Fardel dit avec force le prix à payer pour cette émancipation à marche forcée. Car le passé inlassablement s’invite. Et puis il y a la sœur aînée qui a tout subi elle aussi, mais si elle était Sa préférée, nul ne saura vraiment ce qu’elle a vécu, si ce n’est les quelques révélations faites à sa jeune sœur, puis sa disparition. Et la mère qui a quitté le foyer, ne supportant plus la situation. Un roman rude qui a obtenu plusieurs prix littéraires dont le « Prix du roman Fnac 2022 ». Catherine nous le recommande vivement. 

Martine a deux livres à nous présenter, tout d’abord Mohican, d’Eric Fottorino, un auteur qu’elle apprécie beaucoup. Dans un Jura rude et majestueux se noue le destin d’une longue lignée de paysans, un sujet douloureusement d’actualité. Pour léguer ses terres à son fils Mo et éviter la faillite, Brun décide de couvrir ses champs de gigantesques éoliennes. Mo, lui, aime la lenteur des jours, la quiétude des herbages, les horizons préservés. Quand le chantier démarre, un déluge de ferraille et de béton s’abat sur sa ferme… Avec Mohican, Éric Fottorino mobilise toute la puissance du roman pour brosser le tableau d’un monde qui refuse de mourir. Un livre très parlant pour Martine ! Elle passe à un tout autre sujet avec L’amour de François Bégaudeau. L’auteur signe un roman bref d'un centaine de pages dans lequel il embrasse l'histoire d'amour et la vie commune d'un couple ordinaire de classe moyenne, Jacques et Jeanne Moreau sur près de 50 ans. Un bel exploit de raconter une vie en 96 pages et finalement, on constate que tout est dit. On rit parfois, on est ému souvent mais ce n’est pas larmoyant, un roman à contre-courant sur la beauté des couples qui durent toute une vie. 

Jeannine nous a apporté trois livres, elle a lu Hortense de Jacques Expert, présenté la dernière fois par Fabienne, et elle l’a trouvé très bien, fidèle aux commentaires de cette dernière. Elle a enchaîné avec un livre qui fait beaucoup de bruit en ce moment, Mon mari de Maud Ventura, un premier roman qui est déjà best-seller. Dans ces deux romans, on rencontre des nanas complètement cinglées (sic). La narratrice est mariée à un homme qu'elle adore, tout son monde tourne autour de lui, elle pense constamment à lui, plus qu'à leurs enfants, elle fait tout en fonction de lui...Le roman se déroule sur une semaine et, de jour en jour, la douce folie de Madame prend le pas sur l'apparent bonheur du couple. Jeannine nous le conseille, c’est un ovni, mais c’est très bien. Et voici un livre magnifique qui lui a été offert par ses amies, Histoire de la nuit de Laurent Mauvigné. Au début Jeannine qui aime les écritures efficaces, les phrases courtes, a été désorientée par ce livre, car une phrase peut tenir une page. Et il fait plus de 600 pages, mais elle a adoré ! Il a une façon d’écrire incroyable, on a l‘impression qu’il est dans notre tête. Pour résumer, ça se passe dans un hameau aux alentours de La Bassée, tristement baptisé "Les Trois filles seules", où vivent Bergogne, sa femme Marion et leur fille Ida, ainsi que Christine, une artiste peintre ayant troqué l’agitation parisienne pour la vie rurale. Trois individus vont faire irruption le soir de l’anniversaire de Marion, et vont bouleverser l’existence tranquille de tout ce petit monde. Un huis clos se construit alors, dans lequel les personnages seront emprisonnés le temps d’une nuit. Jeannine a l’impression d’avoir été manipulée par l’auteur, on rentre complètement dans son univers. Un thriller étouffant ! 

Danièle est dans un tout autre registre avec une biographie qu’elle a lu comme un roman, Barbara, un ange en noir d’Alain Wodraska, écrivain, biographe et auteur de chansons. Dans cette biographie intime, l'auteur revient sur la vie de la « longue dame brune » qu'il a côtoyée pendant plus de dix ans. Il nous fait découvrir une femme qui était, en privé, aussi drôle et volubile qu'elle était tragédienne et grave sur scène. Il raconte une Barbara méconnue. L'histoire d'une femme qui a traversé les années avec passion malgré les drames qui ont jalonné sa vie, notamment la guerre, l'inceste, la fugue et la maladie. Barbara, c'est un ange noir qui s'est mis à nu dans son œuvre et a tout donné à son public. Un livre qui fait frissonner ! Pour illustrer le sujet, Danièle, passionnée par les livres jeunesse, a apporté un album intitulé L’aigle noir, dont les paroles de la chanson sont merveilleusement illustrées par Edmée Cannard. Sortons de la musique pour nous plonger dans l’apocalypse, lors d’une émission de radio qu’elle écoutait dans sa voiture où l'on parlait de coupures d’électricité, les chroniqueurs ont évoqué ce roman de René Barjavel qui s’appelle Ravage. Danièle s’est donc replongée dans ce livre terrifiant, un roman de science-fiction qui peut résonner avec notre époque. En 2052, tout le fonctionnement de la société repose sur la technologie. La ville de Paris a été reconstruite à partir des travaux de l'architecte Le Cornemusier (paronyme de Le Corbusier), seul Le Sacré Coeur, vestige de l'ancienne civilisation, domine encore la capitale. Les véhicules se déplacent dans les airs, les robinets distribuent de l'eau et du lait. Les grands écrans ont envahi les logements. Un jour, une gigantesque panne d'électricité paralyse tout le monde. Rapidement, vivre devient impossible et il faut se battre pour survivre. Il y a des scènes très dures à lire, mais ça fait réfléchir. Et si ça arrivait ? 

Pour nous réconforter, nous faisons une pause avec dégustation de galettes et de cidre mis au frais par Nanou. 

Armelle est venue en observatrice, mais elle nous présentera un livre la prochaine fois.

C’est donc au tour de Christine de nous parler d’un livre d’Elizabeth Little, Les filles mortes ne sont pas aussi jolies, un titre qui aiguise la curiosité. C’est un thriller psychologique singulier, truculent. Une peinture au vitriol du monde du cinéma... A priori, Marissa Dahl n'a rien d'une enquêtrice. Timide, un brin asociale, elle cherche surtout à éviter les ennuis. Monteuse de films au talent remarquable, elle vient d'être engagée sur un long-métrage dont le tournage a lieu sur une île isolée. Malgré son comportement tyrannique, on ne refuse pas une offre de Tony Rees, metteur en scène réputé. En arrivant à Kickout, Marissa comprend que quelque chose ne tourne pas rond : une atmosphère de secrets et de paranoïa, des acteurs et des autochtones mal à l'aise. Il faut dire que le film relate une vraie histoire de meurtre, survenu sur l'île vingt ans plus tôt. Pourquoi un tel projet ? Marissa n'en sait pas assez. Elle veut en savoir plus, bientôt elle en saura trop. Alors, il sera trop tard pour revenir en arrière... C’est assez divertissant et ça tient en haleine, Christine voulait tellement arriver au dénouement qu’elle prenait son livre dès qu’elle avait cinq minutes. Quand on ne connaît rien à l’univers du cinéma, c’est intéressant de se retrouver plongé au cœur du tournage, du montage et de toute la technique, ça nous sort de notre quotidien…

Isabelle a lu La petite chartreuse de Pierre Péju, Prix du Livre Inter 2003, un très beau roman que quelques personnes de l’assemblée ont déjà lu. Ça débute comme une histoire de tous les jours qui pourrait arriver à n’importe qui. Une fillette sort de l’école, sa mère est en retard, il pleut. Elle rentre seule, se perd. Aveuglée par les larmes, elle traverse la chaussée glissante sans regarder. Le destin la met sous les roues de la camionnette du libraire Vollard. A la suite de cet accident, la fillette sombre dans le coma. À son chevet, le libraire décide de lui raconter des histoires. Un roman émouvant qui rend hommage à la littérature. A partir d'un banal accident de la route, Pierre Péju entrecroise les histoires de trois solitudes et nous offre un roman déchirant et miraculeusement juste. C’est très bien écrit, Isabelle a beaucoup aimé. 

Chantal continue avec Acide, un premier roman de Victor Dumiot, jeune auteur rencontré à Besançon au mois de septembre. En résumé, Camille voit sa vie basculer un jeudi soir dans le métro, lorsqu’elle se fait vitriolée Quand elle se réveille à l'hôpital quelques mois plus tard, elle n'a plus de visage. Son agresseur a disparu sans laisser de traces. Après moult opérations, les chirurgiens essayent de lui rendent un visage plus au moins humain. Julien, lui, vit enfermé dans son appartement. Solitaire, il passe l'essentiel de son temps à consommer des images pornographiques et à surfer sur le darknet. Un soir, il télécharge par hasard une vidéo de l'agression. Alors qu'il s'enfonce peu à peu dans une spirale de violence et d'autodestruction, il ne pense plus qu'à une chose : retrouver la jeune femme. A la fin ils se rencontrent, mais on ne sait pas vraiment ce qu’il va se passer. Chantal est restée sur sa faim. Ce n’est pas un roman à mettre entre toutes les mains, même si l’écriture est très forte, on parle beaucoup de pornographie, de violence, c’est assez hard, il faut s’accrocher… 

Je terminerai par quelque chose de plus léger. Tout d’abord j’ai lu Fille en colère sur un banc de pierre de Véronique Ovaldé, qui est venue à Montbéliard en novembre dans le cadre des Petites Fugues. Je ne reviendrai pas sur le livre, présenté il y a un an par Catherine, mais j’ai beaucoup aimé cette histoire et le climat sicilien dans lequel elle se déroule. J’avais acheté en septembre un livre de Claire Renaud, qui finalement n’est pas venue à Besançon comme prévu. Cinq articles maximum est un roman se déroulant sur une journée. Juliette, étudiante, travaille pour financer ses études, dans un magasin de vêtements d'une grande chaîne, à Niort. Elle s'occupe principalement des cabines. Elle range, nettoie, plie.. Elle assiste à des tranches de vie de femmes de tout âge et de toute condition. Claire Renaud brosse ainsi  une galerie de portraits, parfois acides, parfois très drôles, mais toujours justes et remplis d'humanité. Elle nous dévoile aussi l'envers du décor, les conditions de travail dans ces chaînes de magasin où tout est normé pour faire du chiffre au détriment des rapports humains. J’ai passé un bon moment ! Autre livre d’une jeune autrice que j’aime beaucoup, Julia Deck, qui raconte les choses avec beaucoup d’humour. J’avais déjà présenté Propriété privée, là il s’agit de son dernier livre Monument national, qui autour d’une gloire vieillissante du cinéma français, met en scène une galerie de personnages hauts en couleur qui tentent d’ajuster leurs rêves à la réalité. Le « monument national », c’est Serge Langlois, équivalent fictif d’un Delon ou d’un Belmondo, gloire vieillie du cinéma français autour duquel gravitent, en son château, les nombreux personnages du roman. Entre people, « gilets jaunes », danseurs de hip-hop et couple présidentiel, on voit vite les similitudes avec des personnalités existantes. L’autrice nous offre une fable réjouissante qui confronte la France d'en haut et la France d'en bas. C’est drôle, mais pas que… 

Bernadette 

 Le prochain Café littéraire se déroulera le Mardi 5 mars à 19h30 à la Louisiane

mercredi 22 novembre 2023

Café littéraire # 61

Pour ce 61ème Café littéraire, nous étions douze, des habituées et Cédric qui nous revenait après des mois d’absence. Ce fut encore une belle soirée riche en échanges. 

Pour une fois, j’ouvre la séance car mon coup de cœur a obtenu le Prix Goncourt le matin même. Il s’agit de Jean-Baptiste Andrea avec son roman Veiller sur elle, dont j’ai dévoré les presque six cents pages tellement l’histoire est prenante. Au début du livre, on se trouve dans une abbaye où le héros est en train de mourir, après y avoir passé quarante ans, sans prononcer de vœux, juste pour veiller sur elle, elle c’est sa dernière œuvre, une piéta à qui l’on prête des pouvoirs, mise à l’abri dans ce lieu par le Vatican. L’auteur reprend toute la vie de ce sculpteur très doué, avec en parallèle une poignante histoire d'amour entre deux enfants que tout sépare, durant la montée du fascisme, mais sans oublier tout le génie de l’art italien. Une très belle écriture, une lecture où l’on ne s’ennuie pas une seconde. Et j’ai la chance d’avoir rencontré l’auteur qui me l’a dédicacé. Autre jeune auteur découvert à Besançon, Quentin Ebrard qui a écrit un court premier roman hors des sentiers battus, cachant une révélation complètement inattendue. Dans Pourvu que mes mains s’en souviennent, nous sommes dans une étrange colonie de vacances, avec des disparitions, des mauvais traitements, une directrice cruelle épaulée par une équipe de tortionnaires. C’est tout cela que Louise raconte alors qu’elle peaufine son plan d’évasion, aidée de Juliette et Simon. Je dois être un peu naïve, mais je n’avais pas vu la fin arriver. Bref, je n’en dis pas plus, lisez-le… 

Fabienne, qui affectionne les polars, nous parle du livre de Jacques Expert, Hortense, inspiré d’un fait réel. L’ex-mari de Sophie, qui l’a abandonné alors qu’elle était enceinte, lui enlève sa fille Hortense. Après des années de recherche, Sophie se fait bousculer dans la rue par une jeune femme, elle croit reconnaître sa fille, la suit, l’aborde, l’auteur multiplie les pistes, enchaîne les rebondissements jusqu’à un dénouement complètement imprévisible. Passons à L’horizon d’une nuit de Camilla Grebe, une autrice suédoise. Banlieue de Stockholm, Yasmin disparaît en pleine nuit. Samir, son père est accusé du meurtre. Une chose impensable pour Maria sa femme, mais petit à petit, le doute l’envahit… Les inspecteurs Gunnar Wijk et Ann-Britt Svensson sont chargés de l’enquête. Jamais faux-semblants et mensonges n’auront autant régné. Il faut attendre la dernière page pour connaître le dénouement auquel on ne s’attend vraiment pas. 

Cédric a renoué avec la figuration, puisqu’il est allé sur le tournage de Leurs enfants après eux, d’après le livre de Nicolas Mathieu, Prix Goncourt 2018. Il avait lu son précédent roman, Aux animaux la guerre, qu’il avait bien aimé, pas pas celui-ci. Donc il fallait le lire, et c’est ce qu’il a fait pendant le tournage. C’est un livre assez violent qui s’étend sur quatre étés, de 1992 à 1998, dans une vallée où les hauts-fourneaux sont à l’arrêt. A travers quelques personnages, dont des adolescents, le portrait d’une France qui change profondément, où ceux qui restent savent qu’ils n’ont aucune chance, malgré les miroirs aux alouettes que politiques et société de consommation leur font miroiter. Le film sortira dans six mois environ. Ça a été tourné à Hayange, ville qui reflète un peu la misère de cette crise. Cédric choisit de nous lire un passage, le portrait d’une femme qui lui a fait penser à sa mère. Il avait préféré le livre précédent, car le fil conducteur est plus difficile à suivre dans celui-là, mais ça décrit bien la vie de ces gens. 

Nous allons changer d’ambiance avec Rosemay qui nous présente Au-delà de la vérité, un livre pour s’évader, de Lucy Clarke, une jeune romancière britannique. Quand Katie apprend la mort de sa petite sœur Mia en voyage pour un tour du monde, elle ne peut croire à la thèse du suicide. Le carnet de voyage de Mia en poche, elle part à la recherche de la vérité. De page en page, de pays en pays, de secrets en révélations, le mystère va s'éclaircir. Un récit bien ficelé qui nous tient en haleine jusqu’au bout, Rosemay a adoré ce livre plein de fraîcheur qui l’a replongée dans des souvenirs de voyages.

Isabelle se replonge dans des livres un peu anciens, en particulier Nuits de princes de Joseph Kessel, publié en 1927, un roman dont l'histoire met en scène les immigrés russes dans le Paris des années folles. Proche de ces derniers par ses origines familiales, l’auteur a ardemment partagé leurs misères et leurs rêves. Ils vivent souvent dans des taudis, mais se retrouvent pour faire la fête dans le Montmartre de l’époque. Outre sa valeur littéraire, Nuits de princes a la force d'un document vrai, qu’Isabelle a lu avec plaisir. Elle souhaite aussi nous parler d’un livre plus régional, puisqu’écrit par Yves Turbergue, auteur audincourtois. Avec « Camille », il signe son quatorzième roman, l’histoire d’une femme au physique disgracieux qui voulait « aimer et être aimée ». Différente, un physique ingrat, enfin c'est ainsi que Camille se voit, elle doit traverser l'enfance d'abord, l'adolescence ensuite, puis continuer sa vie. L'histoire se déroule durant les deux guerres mondiales. Il lui manque des dents, elle a un goitre, mais elle épouse néanmoins un italien et va subir le rejet que subissent les émigrés de cette époque. L’histoire a plu à Isabelle, mais elle trouve que le style est parfois un peu pesant. 

Après une petite pause désaltérante, Christine reprend avec Chaque serment que tu brises de Peter Swanson, un petit thriller psychologique sans prétention qui se laisse lire avec plaisir. Abigaël vient d'épouser Bruce, un millionnaire new-yorkais qui semble avoir toutes les qualités du monde. Pourtant, leur lune de miel sur une île paradisiaque va progressivement tourner au cauchemar. Faux semblants, jalousie et manipulation sont au cœur de ce roman qu’on ne peut pas lâcher. 

Bien qu’étant en vacances, Jeannine n’a pas beaucoup lu, elle se demande ce qu’elle a fait de son temps. Elle a quand-même lu des petits trucs (sic), comme elle a beaucoup aimé Jacky Schwartzmann, cet auteur bisontin, dont elle nous a déjà parlé, elle est allée aux "Papiers bavards" et elle a pris tout le stock. C’est policier mais pas que, par exemple dans Pension complète, on retrouve Dino Scala, obligé de quitter sa compagne richissime et les fastes du Luxembourg après un petit dérapage, qui échoue au camping des Naïades, perché sur les hauteurs de La Ciotat. Il fait la connaissance de Charles Desservy, prix Goncourt et véritable handicapé social venu se confronter à la vie normale. Contre toute attente, le pseudo-gigolo et l’écrivain se lient d’amitié. Mais au paradis des tentes Quechua, des pieds puants et des mojitos sous-dosés, les cadavres commencent à s’accumuler... C’est drôle, bien écrit, avec des critiques sur la société. Jeannine est fan, ce n’est pas si léger que ça ! Il lui en reste deux à lire et elle aura lu les œuvres complètes. Par la même occasion, elle a acheté Petites histoires cruelles de Camilla Läckberg, réunissant deux récits. Dans le premier, trois femmes humiliées, battues, blessées par les hommes, se vengent de leurs bourreaux en échafaudant le crime parfait, tandis que, dans le second, quatre jeunes amis se lancent dans une partie d’action ou vérité à hauts risques, jusqu’au point de non-retour. Deux textes brefs et tranchants, bien racontés par la reine du polar nordique. 

Martine a lu Veiller sur elle, dont nous venons de parler, qu’elle aussi a adoré, mais également Shit de Jacky Schwartzmann, longuement évoqué précédemment. On y suit le parcours de Thibault, CPE dans un quartier sensible de Besançon. Lorsqu'un règlement de compte entre dealers a lieu devant chez lui, il tombe sur beaucoup d'argent et quelques barrettes de shit… et va finir par se transformer lui-même en dealer. C’est loufoque, mais à la fois plausible, avec un humour particulièrement caustique, mais alliant également justesse et finesse. Martine est en train de lire Mohican d’Eric Fottorino, le portrait d’un monde paysan qui refuse de mourir. Elle nous en parlera plus longuement la prochaine fois. 

Françoise nous présente Il n’y a pas de Ajar, de Delphine Horvilleur, femme rabbin et écrivaine, un monologue contre l’identité et ses dérives vers le communautarisme, l’appropriation culturelle. L’ouvrage fait référence à Romain Gary qui a obtenu deux fois le Prix Goncourt sous des noms différents. Il met en scène un personnage fictif, fils d’un pseudo, Emile Ajar, créé par Romain Gary, ce que tout le monde ignorait. Durant tout le spectacle, il nous invite à faire ce pas de géant vers l’autre, cet étranger qui sommeille en nous. Un livre à découvrir … Puis un roman d’une centaine de pages que Françoise a abordé avec un peu de méfiance, car il est d’Amanda Sthers, l’ex de Patrick Bruel. Et là surprise, ce livre est subtil , d’une grande délicatesse. Lettre d’amour sans le dire raconte le parcours d’une femme, à l'approche de la cinquantaine, qui analyse sa vie en la dévoilant, par une lettre, à un masseur japonais dont elle devient assez vite amoureuse. Un livre sensuel, tout en finesse, dans la pure tradition de la littérature japonaise. Un vrai petit bijou ! Finissons avec Erri de Luca, un écrivain issu de la bourgeoisie italienne, qui refuse une brillante carrière pour se confronter à la misère du monde en exerçant des métiers manuels. C’est assez ardu à lire, Acide, arc-en-ciel, un livre de 1992, a pour titre les deux premiers mots du dictionnaire qu’il lisait étant enfant. En haut, à gauche est un recueil de nouvelles, assez étranges, ça mérite d’être lu, mais ce n’est pas d’un abord facile. 

Comme chaque fois, Chantal nous annonce qu’elle va plomber l’ambiance. Tout d’abord avec l’un de ses auteurs préférés Sorj Chalandon, qu’elle a rencontré au Festival à Besançon, et son dernier roman L’enragé. En choisissant de rendre compte par la fiction de la mutinerie de 1934 à la colonie pénitentiaire de Belle-Île-en-Mer, l’auteur s’intéresse ici au thème de la violence faite aux enfants. Autour de son héros, l’introuvable cinquante-sixième évadé de ce bagne pour enfants, l’ancien grand reporter peint l’enfer du bagne. Mais comment s’échapper quand on est coincé sur une île ? Et peut-on vraiment se refaire quand on n’a connu que les coups, les brimades, les insultes et les humiliations ? Le sujet lui parle, puisqu’il a lui-même été victime de violences durant son enfance. Petite anecdote, Jacques Prévert était sur l’île pour tourner un film, lorsque ces événements sont advenus, il en a fait un très beau poème « La chasse aux enfants », que nous lit Chantal. Un roman sombre, mais prenant, qui fait écho au livre que j’ai déjà présenté, Le gosse de Véronique Olmi. Elle a également rencontré Lionel Duroy, un écrivain journaliste, qui présentait son dernier livre Mes pas dans leurs ombres. Si Chantal s’est intéressée à ce livre, c’est parce que Françoise nous avait présenté un livre Les exportés qui révélait les horreurs perpétrés par la Roumanie. Lionel Duroy nous y emmène dans le sillage d’Adèle Codreanu, journaliste française d’origine roumaine. La jeune femme ne connaît que très peu l’histoire de sa famille et de ses parents exilés du communisme. Lors d’un reportage, au fil des rencontres, Adèle découvre l’histoire tourmentée de la Roumanie. Là-bas, personne ne parle des 400 000 juifs exterminés par l’armée, encore en 2020, c’est comme si l’holocauste n’avait jamais existé. Si l’héroïne est une invention de l’auteur, les faits eux, sont bien réels. Et ça fait froid dans le dos... 

Bernadette 

 Le prochain café littéraire se tiendra le Mardi 9 janvier à 18h30 à la Louisiane

mercredi 18 octobre 2023

Café littéraire # 60

Après deux mois de vacances, c’est avec plaisir que nous nous sommes retrouvées (eh oui nous étions 11 femmes) pour parler de nos lectures estivales. Nous souhaitons bon rétablissement aux messieurs que nous espérons retrouver bientôt en forme. 

Isabelle
a lu quelques livres dont on avait parlé lors de nos réunions, mais aujourd’hui elle va nous présenter un livre qui n’est pas récent, sorti du grenier de la tante d’une amie, il s’agit du roman de Jacques Lanzmann, Le têtard, paru en 1976, un roman autobiographique qui raconte l’histoire d’un vrai poil de carotte ballotté dans les tempêtes d’une famille dingue, puis dans le tourbillon de l’Histoire, la guerre, l’Occupation et la Résistance en Auvergne. C’est assez cru, mais bouleversant, car c’est la réalité de son enfance et de son adolescence. Autre lecture passionnante, La Tresse de Laetitia Colombani, un grand classique que beaucoup d’entre nous ont lu, et qui va faire l’objet d’un film qui sortira en novembre. C’est l’histoire de trois femmes aux prises avec une société inégalitaire et patriarcale : Smita, l’Intouchable indienne, Sarah, l’avocate canadienne, et Giulia, la tresseuse sicilienne. Ces trois destins, en apparence isolés, forment ensemble une tresse, car leurs vies sont liées, comme on le découvre au fil du roman. Trois femmes qui se battent contre l’injustice et triomphent malgré tout de l’adversité. Un livre qui ne laisse pas indifférent… 

Fabienne nous a apporté une BD, elle qui n’en lit jamais a fait exception, son frère lui a mis dans les mains avec ordre de la lire. Et il a bien fait ! Le monde sans fin de Jean-Marc Jancovici pour le scénario et Christophe Blain pour le scénario et les dessins, la rencontre entre un auteur majeur de la bande dessinée et un éminent spécialiste des questions énergétiques et de l'impact sur le climat a abouti à ce projet. Une nécessité de témoigner sur des sujets qui nous concernent tous. Intelligent, limpide, non dénué d'humour, cet ouvrage explique sous forme de chapitres les changements profonds que notre planète vit actuellement et quelles conséquences, déjà observées, ces changements parfois radicaux signifient. Un album extrêmement instructif et passionnant. Très dense, documentée et argumentée, cette BD fait réagir sur un sujet terriblement d’actualité : l’utilisation des énergies à travers le monde, les enjeux économiques et les conséquences climatiques. C’est intelligemment amené, de manière non culpabilisante, avec une petite pointe d’humour, et ça pousse à réfléchir. 

Martine nous parle du roman d’Haruki Murakami, Le meurtre du commandeur, en deux volumes, avec du surnaturel, ce qu’elle n’aime pas beaucoup, donc elle l’a abandonné, puis repris, c’est quand-même prenant. Le narrateur est un peintre que sa femme vient de quitter. Il trouve refuge dans une maison isolée dans la montagne, qui a appartenu à un peintre célèbre. Dans le grenier il trouve une toile emballée, le Meurtre du Commandeur. Parallèlement, des événements étranges surviennent : il entend des bruits de clochette la nuit, il rencontre un mystérieux voisin qui lui demande de faire son portrait... Un jour, le Commandeur du tableau lui apparaît. Il mesure 60 centimètres et c’est le début d’un parcours initiatique, étrange et inquiétant, qui va confronter le héros aux obsessions de Murakami : l’art, la solitude, la transmission, la fragilité. Un peu dur pour Martine, qui est contente d’être arrivée au bout malgré tout. Passons à l’éblouissement de son été, La folle allure de Christian Bobin, Lucie aime les loups, choisir son prénom et en changer à sa guise, et fuguer tandis que ses parents, circassiens, s'efforcent toujours de la retrouver et de la ramener dans leur foyer ambulant. La folle allure raconte Lucie, et Prune, et Marilyn, toutes celles qu'elle est, alors qu'elle sillonne les routes dans la plus folle liberté. Un livre merveilleusement servi par l’écriture si poétique de Christian Bobin. C’est magnifique, à lire absolument ! 

Catherine a apporté un roman de Lionel Shriver, intitulé A prendre ou à laisser, une réflexion sur la fin de vie. Après avoir soigné et enterré son père atteint de la maladie d’Alzheimer, Kay et son mari, la cinquantaine, nouent un pacte, ils partiront ensemble le jour de leurs quatre-vingt- ans. Le temps passe et voici qu'arrive la date fatidique. Une date, douze possibilités et une conclusion : dans la vie, tout est à prendre ou à laisser... Hilarante et touchante, une œuvre explosive doublée d'une réflexion mordante sur notre rapport à la vieillesse et sur l'art délicat de préparer sa sortie. Les vingt premières pages du roman nous avertissent avec force détails des incontinences et démences du père de Kay. Cela achève de nous convaincre que mourir dans la dignité est un droit, sinon un devoir. A méditer, alors que cela fait toujours débat dans notre pays. 

Christine le dit elle-même, elle a lu comme d’habitude des livres de développement personnel, mais elle ne nous en parlera pas, car elle pense que nous sommes un peu réfractaires, pas forcément… Elle a lu également Trois, dont nous avons déjà beaucoup parlé et qu’elle a apprécié, et elle va nous parler d’un livre sociologique, La faute à Rousseau d’Eric Naulleau. L’auteur a une dent contre la députée Sandrine Rousseau, il nous montre que le « rousseau­isme » est un sectarisme aux relents totalitaires : il déconstruit la déconstructrice à partir de l'analyse serrée de ses propos, de ses écrits politiques et même de son unique roman : La reine est nue.  C’est très bien écrit et c’est plein d’humour. Avis aux amateurs ! 

Chantal a plusieurs livres à nous présenter, pas vraiment drôles, précise-t-elle, alors commençons par Une fille dans la jungle de Delphine Coulin. La jungle, c’est Calais, cette jungle qui avait été un chaos où des milliers de personnes vivaient, mangeaient, parlaient, se battaient, était devenue un désert, où ils étaient seuls, tous les six, des enfants et des adolescents entre 8 et 17 ans. L’auteur nous livre ici et là des bribes du passé de chacun d'eux et du périple qu'il ont dû enduré pour atteindre la France. Les garçons ont fui leur pays en guerre, les filles ont refusé de se marier de force ou de se prostituer. C'est un livre sur la détresse et sur le désir de liberté. Le second livre Artifices de Claire Berest, la sœur d’Anne Berest, auteur de la carte postale, est une histoire intrigante, avec des personnages très différents et qui pourtant ont un lien. C’est une danse éperdue, où les personnages se croisent, se perdent et se retrouvent, dans une enquête haletante qui voit sa résolution au fil des chapitres. Un livre très prenant… Le dernier, Chantal l’a acheté à Chamonix, où il y avait un rayon de livres sur la montagne, elle a donc choisi Ravage de Ian Manook. L’histoire d’une traque menée par des hommes armés, des chiens et même un avion dans le grand Nord canadien durant l’hiver 1931. Ce roman est inspiré d’un fait divers, ils vont traquer pendant six semaines, par moins 40 degrés Celsius, ce trappeur, ce fugitif qui aurait eu la malchance de tomber au mauvais moment en profitant, d’après certains, des pièges qui n’étaient pas à lui. Un prodigieux roman noir sur fond blanc ! 

Cet été Jeannine a lu Kasso, livre d’un auteur bisontin qu’elle adore, Jacky Schwartzman. C’est très bien écrit, très bien construit, elle a beaucoup ri. Kasso, c’est le sosie de Mathieu Kassovitz, ça se passe à Besançon et ça change tout quand on connaît la ville. Après des années d'absence, Jacky Toudic est de retour à Besançon pour s'occuper de sa mère malade d'Alzheimer. Les vieux souvenirs et copains resurgissent. Les vieux travers aussi. En effet Jacky ne gagne pas sa vie comme les honnêtes gens. Son métier : faire Mathieu Kassovitz. Ça se lit vite et c’est très drôle. De quoi passer un bon moment. Jeannine a lu Trois de Valérie Perrin que nous avions déjà présenté et elle a beaucoup aimé. Petite anecdote « people », en juin dernier Valérie Perrin a épousé Claude Lelouch. Une amie a prêté à Jeannine L’ombre du vent de Carlos Ruiz Zafon, sorti en 2001, un roman foisonnant qui part dans tous les sens, mais qu’on ne peut lâcher. L’histoire est centrée sur un jeune garçon prénommé Daniel Sempere. Le père de Daniel, propriétaire d'une librairie, décide un jour d'emmener son fils au cimetière des livres oubliés. Daniel choisit un roman intitulé L'Ombre du vent, écrit par un certain Julian Carax que l'on croit mort. Le roman passionne le jeune homme qui va chercher à en savoir plus sur le contenu du livre, mais également sur son auteur. Dans sa quête, Daniel fera des rencontres surprenantes qui changeront sa vie à jamais, dans la Barcelone de l'après-guerre civile. Un livre que l’on n'oublie pas !

Françoise, souhaite nous parler de trois livres, tout d’abord un ouvrage qu’elle a trouvé dans une boîte à livres, A la ligne de Joseph Ponthus, un premier roman qui nous livre une sorte d’autofiction où il raconte son expérience dans les usines bretonnes. C’est l’histoire d’un intellectuel qui travaille en région Parisienne et qui décide de tout quitter pour vivre avec celle qu’il vient de demander en mariage, en Bretagne, le portrait d’un homme qui fait ce qu’on appelle un travail alimentaire, dans l’agroalimentaire, justement. Il y fait de belles rencontres, il trime, il souffre, il crie, il chante. Ils chantent, toute la journée, ces travailleurs de l’ombre, dans la pénombre, qui brisent leurs os au travail. Un témoignage remarquable, mais effrayant… Françoise a trouvé dans cette même boîte à livres une écrivaine qu’elle connaissait de nom, mais dont elle n’avait jamais rien lu, Selma Lagerlof et son livre Le violon du fou, livre de 1899 réédité en 2006. Beaucoup de merveilleux, de surnaturel dans ce livre qui raconte l'histoire d'un jeune étudiant qui passe son temps à jouer du violon. Mais lorsqu'il apprend que sa mère est endettée et son domaine sur le point d'être vendu, il entreprend de gagner de l'argent dans l'élevage et la vente de chèvres. Opération qui tourne à la catastrophe et le pousse aux portes de la folie. le jeune homme devient alors colporteur. Parallèlement on suit l'histoire d'Ingrid, une jeune orpheline entraperçue alors qu'il était étudiant. Entre les deux jeunes gens , un lien puissant et surnaturel les unit. Pourront-ils se retrouver ? L'amour pourra -t-il triompher ? Un livre assez déstabilisant, mais qui mérite d’être lu. En ce moment Françoise lit Erri de Lucca, un auteur qui écrit remarquablement bien, elle a terminé Acide, arc-en-ciel et a commencé En haut à gauche, un recueil de nouvelles, elle nous en parlera peut-être plus longuement la prochaine fois. 

Rosemay nous a apporté deux ouvrages, tout d’abord Les femmes du bout du monde de Mélissa Da Costa, elle a moins accroché qu’aux autres livres de l’auteur. Dans la région isolée des Catlins, en Nouvelle-Zélande, Autumn et sa fille Milly s'occupent du camping Mutunga o te ao, qui signifie le bout du monde en maori. Au cœur d'une nature sauvage et luxuriante, elles accueillent Flore, Parisienne à la recherche de rédemption. Les trois femmes apprennent à se connaître, à s'aimer et à faire la paix avec leur passé. De belles descriptions de paysages et beaucoup d’humanité dans ce livre. Rosemay adore Maud Ankaoua, et nous parle de son dernier livre, Plus jamais sans moi, un roman qui fait du bien. Constance, avocate, obtient le poste qu'elle espérait dans un cabinet d'élite. Pourtant, proche de la quarantaine, elle se sent vulnérable et peu sûre d'elle. Elle est follement éprise de Lucas et attend que celui-ci tienne sa promesse et quitte sa femme. Mais une fois son contrat signé, elle entame une période d'essai peu conventionnelle qui bouleverse sa vision d'elle-même et de l'amour. Un récit qui met la quête du bonheur au cœur des expériences les plus inoubliables. 

Quant à moi, je souhaite parler d’un livre que l’on m’a offert, et qui m’a bouleversée. Le gosse de Véronique Olmi raconte le parcours d’un gamin orphelin, placé par l’État dans une famille paysanne en Picardie, puis envoyé à la Petite Roquette suite à des tentatives de fugues, et enfin placé à Mettray dans ce qu’on peut appeler un bagne pour enfants. La plume de Véronique Olmi est incisive, juste et riche. Elle décrit bien la réalité de ces enfants soumis à l'Assistance publique durant l'entre deux guerres. Un roman vrai et bouleversant sur un pan très sombre et méconnu de notre histoire. Comme j’aime beaucoup Valérie Perrin et que je n’avais pas lu son premier roman, Les oubliés du dimanche, c’est chose faite. Justine, 21 ans, vit chez ses grands-parents, suite à la perte de ses parents dans un accident. Elle travaille dans une maison de retraite, et elle recueille les confidences des personnes âgées, en particulier celles d’Hélène, qu’elle va coucher sur le papier pour pouvoir lui relire, afin qu’elle n’oublie pas sa vie. C’est plein d’humanité, et très émouvant. Cette fois j’ai lu ses trois romans, j’attends le quatrième... 

Bernadette


 Le prochain rendez-vous est fixé au Mardi 7 novembre 2023 à 19h30 à la Louisiane