lundi 29 juillet 2024

Café littéraire # 65

Nous étions neuf lectrices assidues pour ce dernier café littéraire de la saison. 

Jeannine
a pris la parole pour nous parler de deux livres plusieurs fois évoqués ici et qu’elle a appréciés, Tout le bleu du ciel de Mélissa da Costa, malgré une invraisemblance vers la fin, ce livre lui a donné envie d’aller dans les Pyrénées, un peu à l’eau de rose, mais juste ce qu’il faut. Quant à La décision de Karine Tuil, elle a été remuée par ce livre et ce métier que finalement on ne connaît pas. Son chouchou du moment Jacky Schwartzmann a sorti une BD, dont il a écrit le scénario avec Sylvain Vallée qui l’a illustrée. C’est de la même veine que ses romans, un homme en cavale, des mafieux à sa recherche et une paroisse comme planque idéale… tel est le programme d’Habemus Bastard, nouvelle bande dessinée, qui joue avec les genres entre polar, humour et satire. Les illustrations sont belles et le fait que ça se passe à Saint-Claude dans le Jura a plu à Jeannine, qui trouve qu’il y a beaucoup de finesse dans cet ouvrage. Elle souhaite encore nous parler d’un magazine féministe auquel elle est abonnée, qui s'appelle Clara, qui paraît six fois par an, et qui traite de culture, de sport, de sciences, par rapport à la place de la femme dans tout ça, très intéressant… 

Christine a apporté deux livres, Le couteau de Salman Rushdie, qu’elle a lu par curiosité, n’ayant jamais rien lu de cet auteur. Il s’agit essentiellement de la tentative d’assassinat qu’il a subie, il revient aussi sur des événements de sa vie, c’est donc autobiographique. C’est facile à lire, bien écrit, et on se rend compte que pour quelques chapitres qui n’ont pas plu dans Les versets sataniques, il l’a payé pour le reste de sa vie. Le Couteau se lit aussi comme une réflexion puissante, intime et finalement porteuse d’espoir sur la vie, l’amour et le pouvoir de la littérature. C’est également une ode à la création artistique comme espace de liberté absolue. Le deuxième livre est très original, un peu fantastique, traduit du japonais. Tant que le café est encore chaud de Toshikazu Kawaguchi raconte un huis-clos dans un café au Japon, où l’on a la possibilité de retourner dans le passé . Mais ce voyage comporte des règles : il ne changera pas le présent et dure tant que le café est encore chaud. Ce sont toujours les mêmes personnes, le même serveur, qui sont présents et ce délicat roman introspectif est aussi une belle réflexion sur le temps qui passe, il s’en dégage une douce philosophie qui nous incite à vivre pleinement le présent. Christine a été émue par ce livre, son atmosphère dépaysante, il fait partie des livres qu’elle gardera dans sa bibliothèque. 

Chantal, qui aime beaucoup David Vann , est tombée sur ce roman qui n’est pas très récent, et qui s’intitule Aquarium. Elle en a déjà lu trois de cet auteur, ça se passe parfois en Alaska ; là où il est né, souvent dans des milieux assez hostiles. Celui-ci se passe à Seattle, où Caitlin, 12 ans, vit avec sa mère dans un modeste appartement. Pour échapper à son quotidien, elle visite chaque soir un aquarium, où elle se lie peu à peu d'amitié avec un vieil homme. Un jour, elle découvre que sa mère le connaît et qu'un lien secret les unit. Ca va devenir un cauchemar, avec malgré tout l’idée d’un pardon, d’une résilience. L’écriture est très riche, mais il faut s’y habituer, car les dialogues sont insérés dans le texte, sans tirets. Un roman très dur, comme Chantal les aime, mais qui intrigue, alors pourquoi pas ? Passons à Vivre vite de Brigitte Giraud, prix Goncourt 2022. En 1999, l’auteur s’apprêtait avec son conjoint à acheter la maison de leur rêve à Lyon, lorsque celui-ci emprunte une moto très puissante pour aller au travail, et se tue. Elle va néanmoins y emménager avec son fils. Vingt ans plus tard, des immeubles vont envahir le quartier, et la maison va être rasée. Avant de quitter cette maison, elle revient sur cet accident, sous forme de vingt-trois chapitres, commençant par et si ... et si…, et si… , pour tenter de donner un sens à cette mort absurde, d’ailleurs Vivre vite est un titre emprunté à Lou Reed, l’un des musiciens préférés de Claude, son compagnon. Une histoire personnelle très touchante. 

C’est au tour de Catherine de nous parler d’un polar qui fait partir d’une trilogie de Nicolas Lebel. Le premier L’heure des fous, elle ne l’avait pas trouvé très bien, par contre celui-là Le jour des morts, elle l’a beaucoup aimé. Il y a un capitaine qui est génial, en résumé, on est à Paris à la Toussaint, le capitaine Mehrlicht et ses acolytes sont appelés à l’hôpital Saint-Antoine : un patient vient d’y être empoisonné. Les victimes se succèdent, la France prend peur, qui est cette jeune femme d’une trentaine d’années que de nombreux témoins ont croisée ? Comment peut-elle tuer depuis quarante ans et en paraître trente ? Surtout, qui sera sa prochaine victime ? Catherine nous lit deux passages qu’elle a adorés. C’est policier, mais ça parle aussi des travers de la société, c’est très bien ! Un petit mot pour dire que Catherine a lu Veiller sur elle, et que comme les autres lectrices, elle a beaucoup aimé. 

Pour ne pas faillir à la tradition, Fabienne nous a apporté un thriller, La femme parfaite de J.P. Delaney. Abbie est amnésique lorsqu'elle se réveille à l'hôpital. L'homme à son chevet prétend être son mari. Fondateur d'une start-up innovante de la Silicon Valley, il lui apprend qu'elle est artiste et mère d'un petit garçon. Cinq ans auparavant, la jeune femme a eu un grave accident et les innovations dans le domaine de l'intelligence artificielle ont permis son retour à la vie, dans un corps de robot. L'auteur aborde aussi les thèmes de l'intelligence artificielle et de l'utilisation des robots dans l'amélioration de notre vie quotidienne. Un thriller psychologique bien construit, un roman surprenant, qui nous emmène de surprise en surprise, un roman particulier que Fabienne a apprécié, même si certaines d’entre nous restent sceptiques face au sujet. 

Martine va reparler brièvement de Nicolas Lebel, et particulièrement d’une trilogie comprenant La capture, Le Gibier, et enfin L’hallali dont elle va nous parler. C’est plein de ressources, de rebondissements, Yvonne Chen n’a pas d’amis et elle n’en veut pas : ils l’ennuient ou finissent par mourir. Lorsque, en ce 5 janvier, son téléphone sonne, elle sait donc que ce n’est pas un ami qui l’appelle. Les Furies, ces tueurs à gages sans foi ni loi, sont de retour et leur chef Alecto propose à Chen de participer à l’une de leurs danses… Deux frères se disputent le contrôle d’un prestigieux vignoble dans les Vosges et, d’après le commanditaire anonyme, il ne doit en rester qu’un. On ne s’ennuie pas du début à la fin. Puis Martine a lu Python de Nathalie Azoulai, auteur dont elle avait déjà présenté La fille parfaite, qu’elle avait beaucoup aimé. Dans ce livre ce qui l’a intéressée, c’est le titre car dans ses dernières années d’enseignement, Martine a dû se mettre à Python, qui est un langage codé pour écrire des algorithmes. Ce roman (mais est-ce vraiment un roman ?) montre Boris qui a « passé la nuit à coder ». Il ne déjeunera pas avec son père, Pierre, et ses invités. Parmi eux, la narratrice, qui le regarde, les écouteurs sur les oreilles, taper sur son clavier inlassablement. Retranché du monde, il semble « garder jalousement un trésor ». Un jeune homme qui « aurait pu avoir dansé, bu ou baisé toute la nuit » est resté chez lui, à « coder ». Quelle est la puissance de ce code qui aspire la vitalité de millions d’obsessionnels ? La question va faire basculer la vie de la narratrice, la jeter dans un monde à mille lieues du sien, et pourtant si proche. Martine a appris beaucoup de choses sur Python, mais elle trouve qu’à la fin ça devient un peu glauque. Elle l’a lu jusqu’au bout, mais a été fatiguée par toutes les références cinématographiques, littéraires et scientifiques qui l’ont obligée à faire des arrêts pour se documenter. Elle a peine à croire à cette histoire, pas convaincue donc… Par contre elle a adoré Philippe Besson et son livre Ceci n’est pas un fait divers. Un tout petit livre qu’on lit presque en une fois. L’auteur se penche avec humanité et sensibilité sur le sujet des féminicides. L’histoire est inspirée d’un fait réel. Un mari qui tue son épouse (17 coups de couteau) avant de prendre la fuite, alors qu’elle s’apprêtait à le quitter après des années de violences et d’humiliations  et la fille qui entend tout. C’est finement écrit, on sait qu’il y a de l’espoir, mais que ce sera difficile, à lire absolument… 

Sur les conseils de Gérard, j’ai lu Le roman de Jim, que j’ai beaucoup aimé, j’attends le film avec impatience, et sur les conseils de Françoise, j’ai lu Meccano, qu’elle n’avait pas lu jusqu’au bout. Ce n’est pas un livre facile, car la première partie est très technique, j’ai préféré la deuxième partie, j’ai appris beaucoup de choses sur les trains, et la façon dont c’est écrit est originale, puisque c’est comme de la poésie, sans les rimes, mais il va à la ligne au milieu des phrases. Un livre hors du commun ! Mais je souhaite présenter Ne réveille pas les enfants d’Ariane Chemin, sur un fait divers de 2022 qui m’avait marquée. Le 24 mars 2022 une famille française se jette du septième étage de son balcon, face au lac Léman, à Montreux, en Suisse. “Suicide collectif”, concluent presque aussitôt les enquêteurs, malgré la présence de deux enfants mineurs. Un an plus tard, le dossier est clos. La journaliste établit avec justesse des liens entre cet événement, réduit par la justice suisse et la presse à une banale histoire de complotistes à tendance survivaliste, et des faits tout aussi dramatiques qui se sont déroulés en Algérie le 15 mars 1962, quelques jours avant les accords d’Évian. Une enquête sur une affaire qui a défrayé la chronique mais de laquelle finalement on sait peu de choses. 

Nous terminons avec Françoise qui nous présente un livre différent, puisqu’il s’agit d’un livre de cuisine, Ayurveda cuisine pour tous les jours, d’Archcena Nagalingam. Un livre qui présente les principes de l’ayurveda et bien entendu des recettes. Pour rappel, la cuisine ayurvédique est une manière de prévenir et guérir des maladies tout en prenant plaisir à manger. Savoir quoi manger en fonction de sa constitution n'est pas toujours facile, et les livres semblent être remplis de concepts complexes et de longues explications érudites. Dans ce livre, on découvre des principes simples et ludiques et plus de 80 recettes végétales pour mieux manger. Il y a trois types de profils, les trois doshas qui sont Vata, Pitta et Kapha. Grâce à un questionnaire, Françoise s’est totalement retrouvée dans Kapha. L'Ayurveda est une médecine ancestrale, mais aussi une philosophie et un véritable mode de vie qui s'occupe du bien-être de l'être humain dans sa globalité. Elle a testé certaines recettes qui sont très bonnes. C’est une cuisine végétarienne évidemment. Un très beau livre dans lequel il faut se plonger…

Puisque nous sommes en été, nous terminons la séance avec une dégustation des délicieuses glaces de Nanou. Bonnes vacances et belles lectures à tous. 

Bernadette

 Le prochain Café littéraire aura lieu le mardi 24 septembre.
 Il sera précédé de l’Assemblée Générale.