vendredi 30 juin 2017

Compte-rendu du Café littéraire #24

Ce 24ème et dernier café littéraire de la saison a rassemblé une douzaine de personnes à la Louisiane, dont quelques têtes nouvelles que nous retrouverons peut-être en septembre.

C’est Catherine qui s’est lancée la première pour nous parler d’un livre d’Alain Cuche, auteur franc-comtois, qui s’intitule Louise peut dormir en paix, certains témoignages de l'histoire restent enfouis au fond de malles abandonnées dans des greniers poussiéreux. Ce sont bien souvent des lettres ou des photos d'hommes et de femmes qui furent plongés dans le cahot d'une époque de guerre, de feu et de sang. Mais la découverte de Léon Delattre est d'une toute autre dimension. Cet ancien libraire tombe sur un ouvrage historique à la fois effrayant et inestimable. Un véritable trésor pour les scientifiques spécialisés dans l'époque du nazisme. Cependant, cette découverte met sa vie en danger. Les vieux démons rôdent autour de lui. Désormais, seul son jeune ami Vincent et Max, un ancien flic atypique, peuvent lui venir en aide. Elle trouve que le sujet, historique, est excellent, mais qu’il n’est pas assez approfondi par l’auteur, et que l’écriture est un peu facile… De la déception donc par rapport à ce livre…

Catherine a lu également Tu comprendras quand tu seras plus grande de Virginie Grimaldi, et là elle est beaucoup plus enthousiaste. C’est l’histoire de Julia qui débarque comme psychologue à la maison de retraite Les Tamaris, à Biarritz, elle ne croit pas plus au bonheur qu’à la petite souris. Pire, une fois sur place, elle se souvient qu’elle ne déborde pas d’affection pour les personnes âgées. Et dire qu’elle a tout plaqué pour se sauver, dans tous les sens du terme. Au fil des jours, Julia découvre que les pensionnaires ont bien des choses à lui apprendre. Difficile pourtant d’imaginer qu’on puisse reprendre goût à la vie entre des papys farceurs, des mamies fantaisistes et des collègues au cœur brisé… Et si elle n’avait pas atterri là par hasard ? Et si l’amour se cachait là où on ne l’attend pas ? C’est l’histoire de chemins qui se croisent : les chemins de ceux qui ont une vie à raconter et de ceux qui ont une vie à construire. C’est une histoire d’amour(s), une histoire de résilience, une ode au bonheur. « Un humour décapant, des personnages attachants et une profonde humanité. En le refermant, on n’a qu’une envie : se délecter des petits bonheurs qu’offre la vie. » Catherine a trouvé le livre très bien écrit et très drôle par moments. De quoi se réconcilier avec les maisons de retraite…

Rose-May, qui nous rejoignait pour la première fois, nous a parlé du livre de Gilles Legardinier, Ça peut pas rater, - J'en ai ras le bol des mecs. Vous me gonflez ! J'en ai plus qu'assez de vos sales coups ! C'est votre tour de souffrir ! Marie pensait avoir trouvé l'homme de sa vie, jusqu'à ce que son couple implose de façon brutale et scandaleuse. Anéantie, elle prend une décision sur laquelle elle jure de ne jamais revenir : ne plus faire confiance aux mâles et surtout, ne plus rien leur passer. Ni dans sa vie privée, ni au travail. On remet les compteurs à zéro. On renverse la vapeur. La gentille Marie est morte, noyée de chagrin. À présent, c'est la méchante Marie qui est aux commandes. Marie est remontée comme un coucou. Marie ne croit plus à l'amour, ce mirage source de tous les malheurs des femmes. Mais voilà, Marie a du cœur, une famille, des amies aussi tordues qu'elle et une soif de vivre qui n'a pas fini de la précipiter dans des plans impossibles. Et si, au-delà de ses illusions perdues, il était temps pour elle de découvrir tout ce qui vaut vraiment la peine d'être vécu ? Un livre que Rose-May a trouvé très drôle, et qui étonnamment est écrit par un homme. Un livre à mettre dans sa valise pour une lecture sur la plage…

Edith, quant à elle, a lu des livres plutôt sombres. Tout d’abord, La fabrique des pervers, de Sophie Chauveau, un roman qui fait froid dans le dos. Comprenant qu’elle était loin d’être la seule à avoir connu une enfance et une adolescence saccagées, Sophie Chauveau a enquêté pour dresser l’inventaire des victimes et des bourreaux de sa famille. La dynastie de pervers, qui commence avec le dépeceur du Jardin des Plantes pendant le siège de Paris, se poursuit sur trois générations. Unique par l’ampleur de ce qu’il dévoile, son témoignage sur l'inceste est d’une force inouïe. Voici le roman monstrueux d’une famille hors normes.

Le deuxième, La disparue de Capodi Feno, de Claude Dubois, est l’histoire un peu romancée de Sophie Arnoult, âgée de 23 ans, qui se trouvait sur l’île de Beauté avec un ami du pays de Montbéliard pour y faire de la randonnée. Son ami s’est blessé à une cheville au cours de la marche. Elle est partie chercher du secours. Jamais, elle n’a redonné signe de vie. L’armée a sondé le maquis. Des pistes. Des hypothèses. Mais jamais le moindre élément matériel. Edith est d’autant plus touchée par ce livre, qu’elle fait de la marche avec l’auteur et avec les parents de Sophie. Elle nous dit qu’elle préfère ne pas savoir la part du vrai et du romancé dans ce livre.

Noëlle nous parle d’un petit ouvrage qui avait déjà été évoqué il y a quelques années ici-même. Il s’agit d’un petit fascicule d’une dizaine de pages qui s’intitule Matin brun de Franck Pavlov. Matin brun raconte l'histoire de deux amis confrontés à un régime politique totalitaire : l'État Brun. Ils s'y soumettent sans se rendre compte du danger. Pourtant les règles sont déconcertantes, toutes en rapport avec la couleur brun. Tout a commencé avec les animaux de compagnie dont la couleur devait être conforme à l'état brun, puis cela a continué avec les uniformes bruns, le journal brun et cela s'est terminé par une descente de police au domicile du héros au cours de laquelle on peut imaginer le pire. Cette histoire est source de réflexion. Elle nous amène à nous interroger sur les règles auxquelles nous sommes soumis et sur notre devoir de résistance.

Sylvain, qui était déjà venu il y a quelques années, nous a présenté deux livres : L’homme des bois, de Pierric Bailly, qui évoque la mort de son père trois mois avant sa retraite, les circonstances de celle-ci, le parcours obligé des obsèques et des tâches administratives afférentes, la pudeur d'un homme à la fois sociable et secret, les liens qui l'unissaient à son fils. Le portrait d'un homme, mais aussi d'une génération dans les campagnes françaises, celle de travailleurs sociaux, militants politiques ou associatifs, à une époque. Pierric Bailly est un auteur franc-comtois, qui a mis son écriture très épurée au service de ce récit de deuil.

L’autre livre présenté par Sylvain est La coalition d’Emmanuel Bove. Louise Aftalion et son fils Nicolas reviennent à Paris. Veuve d’un perdant venu de loin pour échouer, mère d’un garçon sans vergogne qui ne la quitte pas et entretient ses dernières illusions, elle espère renouer avec sa famille et remédier à la gêne qu’elle sent poindre. Mais la faible compassion des uns conjuguée à l’insoutenable inconséquence du duo va vite contribuer à l’allègement dramatique de leurs finances. Avec ce génie narratif que personne ne dispute à Emmanuel Bove, La Coalition nous raconte, précis et cruel, la lente descente aux enfers d’inadaptés qui sont persuadés que le monde entier leur en veut mais que le pire est pourtant impossible. Ce roman à l’écriture ironique, écrit en 1927, vient d’être réédité.

Puis c’est Denis, fan de dictionnaires en tout genre, qui nous a présenté son Dictionnaire des mots obsolètes, intitulé Turlupinades et tricoteries, d’Alain Duchesne et Thierry Leguay. Un dictionnaire malicieux qui traite avec justesse toute une cartographie, celle de l'évolution des mœurs et des mentalités dont témoignent aussi les mots perdus... et ici retrouvés. Ce dictionnaire, édité chez Larousse, fait partie d’une collection fort intéressante sur la langue française.

Denis nous a également parlé du livre Mémoire de maîtres, paroles d’élèves, publié chez Librio. Les auditeurs de Radio France ayant fréquenté l’école, le collège ou le lycée entre 1950 et 1970 ont été sollicités pour « faire ressortir des traces, des témoignages représentatifs de notre mémoire collective ». Ces témoignages ont été rassemblé par Jean-Pierre Guéno. Cet ouvrage fait partie de la collection « Paroles de…. » qui fait parler des détenus, des femmes, des juifs, des exilés etc…

Françoise nous a fait passer un livre qu’elle a eu en cadeau et qui est magnifique. Il s’agit de La cuisine des fées de Gilles et Laurence Laurendon et Christine Ferber aux Editions du Chêne. Les recettes de cuisine ont la magie des contes. Gilles et Laurence Laurendon ont eu l'idée d'associer les deux dans ce livre où le merveilleux surgit à chaque page. Pour illustrer les passages gourmands tirés de Pinocchio, Cendrillon, Hansel ou Gretel, et autres histoires féeriques, ils ont fait appel à la fée des confitures, Christine Ferber, afin d'en imaginer les recettes. 75 recettes sont magistralement mises en scène par Philippe Model, créateur reconnu réalisant des décors pour des maisons de luxe. Photographe de grand renom, Bernhard Winkelmann contribue à l'enchantement du livre en capturant les étonnantes gourmandises dans son objectif.

Françoise nous a également parlé du mensuel gratuit Biocontact, distribué gratuitement dans les magasins bio, et qui depuis 1991, informe les consommateurs de produits bios sur les thèmes de l'alimentation saine, les techniques de bien-être et de santé, le respect de l'environnement.

Jean-Daniel a reçu en cadeau La vie secrète des arbres de Peter Wohlleben. Les citadins regardent les arbres comme des "robots biologiques" conçus pour produire de l'oxygène et du bois. Forestier, Peter Wohlleben a ravi ses lecteurs avec des informations attestées par les biologistes depuis des années, notamment le fait que les arbres sont des êtres sociaux. Ils peuvent compter, apprendre et mémoriser, se comporter en infirmiers pour les voisins malades. Ils avertissent d'un danger en envoyant des signaux à travers un réseau de champignons appelé ironiquement "Bois Wide Web". La critique allemande a salué unanimement ce tour de force littéraire et la manière dont l'ouvrage éveille chez les lecteurs une curiosité enfantine pour les rouages secrets de la nature. Jean-Daniel a fait l’effort de le lire jusqu’au bout, mais il pense qu’il faut vraiment être passionné par le sujet pour apprécier pleinement ce livre.

Il a lu également Le revenu de base d’Olivier Le Naire et Clémentine Lebon. Libérale ou étatique, aucune des solutions tentées par nos gouvernements pour sauver un modèle devenu obsolète n'a abouti. La France compte aujourd'hui 5 millions de chômeurs, plus de 8 millions de pauvres et elle finance ses retraites par le déficit. Pourtant la plupart des candidats à l'élection présidentielle reviennent avec leurs mêmes vieilles recettes. Seule émerge une proposition originale : le revenu de base. Son principe ? Verser à chacun, de sa naissance à sa mort et sans condition, une somme qui lui permettrait de vivre une existence décente. Et d'exercer pleinement sa citoyenneté. Un sujet d'actualité dans un monde où le travail, la croissance et les carrières ne sont plus garantis. Cette proposition n'est-elle qu'une utopie ? En quoi pourrait-elle concrètement changer nos vies ? Pourquoi de plus en plus d'intellectuels, d'économistes, de politiques veulent-ils l'expérimenter ? Pour quelle raison ce concept est-il défendu à la fois par des libéraux et des altermondialistes ? Risque-t-il de fabriquer une société d'assistés ? Quelles sont les pistes pour le financer ? Sans parti pris, mais avec la conviction que ce débat doit enfin être mis sur la table, les auteurs donnent pour la première fois les outils clairs et précis afin de bien comprendre ce sujet complexe mais crucial. Et de permettre à chacun de se faire son opinion. En toute liberté. A réfléchir…

Enfin j’ai présenté deux livres qui m’ont fait passer un bon moment, d’une part Le liseur du 6h27 de Jean-Paul Didierlaurent, que plusieurs personnes m’avaient incitée à lire, et je ne l’ai pas regretté. Employé discret, Guylain Vignolles travaille au pilon, au service d'une redoutable broyeuse de livres invendus, la Zerstor 500. Il mène une existence maussade mais chaque matin en allant travailler, il lit aux passagers du RER de 6h27 les feuillets sauvés la veille des dents de fer de la machine ...Dans des décors familiers transformés par la magie des personnages hauts en couleurs, voici un magnifique conte moderne, drôle, poétique et généreux : un de ces livres qu'on rencontre rarement. A lire absolument !

Lors du repas solidaire organisé par notre association, j’avais lu un extrait très drôle qui m’avait donné envie de lire le roman. C’est chose faite avec Saint Futile d’Alix Girod de l’Ain. Les articles d'humeur de Pauline Orman-Perrin, dite POP, dans le magazine Modelle, ont fait sa réputation de journaliste vive, rigolote et gâtée. Après un douloureux accident du travail dans une boutique à la mode et une rencontre -rêvée ? -avec Dieu, le sosie de Karl Lagerfeld, POP se voit confier la mission de donner du sens à sa vie, tant professionnelle que privée. Mais transformer une famille désordonnée et joyeuse en cellule d'accomplissement de soi et un magazine féminin en temple de la quête de sens, est-ce bien raisonnable ? Son mari et ses enfants, s'habitueront-ils à la personne d'humeur égale qui leur tient lieu d'épouse ou de mère ? Les rédactrices en chef de Modelle, malgré toute l'affection qu'elles lui portent, continueront-elles à employer une journaliste qui refuse d'écrire la moindre perfidie sur qui que ce soit. En un mot, la perfection est-elle supportable. ? Pour Pauline, la rédemption ne viendra pas d'en haut, mais des gens qui l'aiment et lui feront ouvrir les yeux sur un message cher au cœur de l'auteur : le futile, c'est utile, seule la légèreté a le poids suffisant pour équilibrer la balance de la vie. Un livre drôle à lire entre deux lectures plus sérieuses.

Le prochain café littéraire aura lieu le Mardi 19 septembre

Bernadette

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