lundi 29 septembre 2025

Café littéraire # 73

Nous étions une dizaine pour cette rentrée littéraire encore riche en échanges. 

Armelle
a souhaité prendre la parole la première pour nous parler du livre Connemara de Nicolas Mathieu dont l’adaptation cinématographique sort en ce moment. Paru en 2022, l’auteur parle toujours un peu des mêmes sujets, la désindustrialisation, l’adolescence, les différences de classes sociales. Une belle histoire d’amour, mais qui n’est pas simple… Issue d'un milieu modeste, Hélène a quitté depuis longtemps les Vosges. Aujourd'hui, elle a la quarantaine. Un burn-out brutal l’oblige a quitter Paris, revenir là où elle a grandi, entre Nancy et Epinal. Elle s'installe avec sa famille, retrouve un bon travail, la qualité de vie en somme… Un soir, sur le parking d’un restaurant franchisé, elle aperçoit un visage connu, Christophe Marchal, le bel Hockeyeur des années lycées. Christophe, ce lointain objet de désir, une liaison qu'Hélène n'avait pas anticipé... Dans leurs étreintes, ce sont deux France, deux mondes désormais étrangers qui rêvent de s’aimer. Cette idylle sera-t-elle possible ? Beaucoup de sujets sont abordés dans ce roman, Nicolas Mathieu a le don de se couler dans la tête de ses personnages, et de rendre compte de leurs mondes avec une extrême justesse.

Andrée-Claude accompagne Armelle, mais n’a pas apporté de livre. 

C’est donc Thérèse et sa liseuse qui prennent le relais, pour nous présenter Les ombres du monde, le dernier livre de Michel Bussi, sélectionné pour le Renaudot. Elle ne lisait plus cet auteur, car elle trouvait que ses livres perdaient de l’intérêt au fil du temps, mais celui-ci est vraiment différent, puisqu’il nous entraîne au Rwanda au moment du génocide. Octobre 1990, le capitaine français Jorik Arteta, en mission au Rwanda, rencontre Espérance, jeune professeure engagée dans la transition démocratique de son pays. 6 avril 1994, un éclair déchire le ciel de Kigali. Le Falcon du président rwandais explose en plein vol. Commencent alors cent jours de terreur et de sang. Les auteurs des tirs de missiles ne seront jamais identifiés. Quelqu'un, pourtant, connaît la vérité. Noël 2024. Jorik, sa fille et sa petite-fille s'envolent pour le Rwanda. Tous poursuivent leur propre quête, tourmentée par les fantômes du passé. Un livre très bien documenté, dans lequel Thérèse a appris beaucoup sur un sujet qu’elle connaissait mal. Dans le même esprit, elle a beaucoup aimé le livre d’Olivier Norek, Les guerriers de l’hiver, qui parle du conflit Finlande-Russie pendant la deuxième guerre mondiale.

Fabienne a apprécié Jules de Didier Van Cauwelaert, un livre de 2015 plus léger que ce qui vient d’être présenté. Entre une miraculée de la chirurgie et un vendeur de macarons, une histoire de renaissance mutuelle et de passion volcanique orchestrée, avec l’énergie du désespoir, par le plus roublard des chiens d’aveugle. Un livre plein de rebondissements et de mésaventures, qui fait rire même s’ils ont la poisse. C’est facile à lire et distrayant, même si ça aborde quelques graves sujets de société. Un livre qui rend heureux ! 

Parmi tous les livres que j’ai lu cette été, j’ai eu du mal à en choisir deux, mais mon choix s’est porté sur un livre de Lorelou Desjardins que j’avais repéré sur internet et que j’ai commandé. Au coin du fjord raconte les aventures d’une Française en Norvège, et la première année de sa vie là-bas, où il a fallu s’adapter au climat et à la façon de vivre des Norvégiens. Ce livre est une célébration de l'adaptabilité et de la résilience personnelle face aux défis de l'intégration dans une nouvelle culture. Pour moi qui ne connais pas les pays du nord, ça m’a donné envie de faire ma valise. Puisque nous avons commencé dans le froid, continuons avec Sukkwan Island de David Vann. Nous avions déjà eu l’occasion d’évoquer cet auteur avec Aquarium, qui était déjà un livre assez dur, mais là il faut vraiment s’accrocher. Le talent de l’auteur est tel que malgré la noirceur de ce livre, je ne l’ai pas lâché. Pour résumer, une île sauvage du Sud de l'Alaska, accessible uniquement par bateau ou par hydravion, tout en forêts humides et montagnes escarpées. C'est dans ce décor que Jim décide d'emmener son fils de treize ans pour y vivre dans une cabane isolée, une année durant, jusqu’au drame… Un environnement que l’auteur connaît bien, puisqu’il est né en Alaska. Un film doit sortir en février, je ne sais pas si j'aurai le courage d'aller le voir… 

Françoise qui nous a déjà parlé de Delphine Horvilleur, écrivaine et femme rabbin française, a lu Euh… comment parler de la mort aux enfants. Elle parle surtout de ses expériences personnelles, mais ne donne pas de recette, chacun se débrouille comme il peut. C’est bien écrit, il y a des références, mais Vivre avec nos morts était beaucoup plus construit. Dans une boîte à livres construite par « La lueur des contes », Françoise a trouvé le Guide des égarés de Jean d’Ormesson. Elle connaissait déjà le Guide des égarés écrit par Moïse Maïmonide au XIIe siècle, et elle voulait savoir si c’était un plagiat. C’est bien écrit, ce sont des micro chapitres sur tout ce qui concerne la vie d’un Homme. C’est à la question : "Qu’est-ce que je fais là ?" que s’efforce de répondre ce manuel de poche. Françoise a choisi cinq mots pour le résumer : Notre monde - son mode d’emploi - nos questions - philosophie - bon sens. Poursuivons avec Un si grand désir de silence d’Anne Le Maître, un livre avec beaucoup de références religieuses, une véritable apologie du silence pour prendre du recul face à une société saturée de sons et d'images. L'auteure mêle références littéraires et anecdotes personnelles pour proposer des pistes de réflexion sur le mouvement du monde. Un joli livre qui invite à la méditation, à la sérénité et à l'estime de soi, même s’il y a pas mal de redondances. 

Martine a apporté un livre de Jeanne Benameur, auteur souvent évoquée ici, il s’agit de son dernier roman, Vivre tout bas. Parmi toutes ses lectures d’été, elle a lu celui-ci, offert par une amie très chère, et elle a été un peu désorientée car elle ne s’attendait pas à ça. C’est un livre « sacrément culotté », dixit Martine, car il parle de la vie de Marie, après la mort de son fils. Dans la petite ville normande de Valognes (Manche), une église abrite un haut-relief du XVe siècle qui représente une étonnante nativité : une vierge allongée est en train de lire, tandis que, juste au-dessus d’elle, l’âne et le bœuf veillent sur l’enfant Jésus. Cette Marie, captivée par sa lecture n’a pas échappé à l’œil de la romancière Jeanne Benameur, en visite dans le coin il y a quelques années. L’autrice a relu les Évangiles et a été contrariée par le peu de place accordé à Marie, elle a décidé d’y remédier. Martine n’était pas vraiment pressée de s’y plonger, et pourtant ce fut une bonne surprise. C’est très poétique, Marie n’est jamais nommée, elle désacralise l’image de cette sainte pour en faire juste une femme qui se découvre, qui découvre la liberté. Un livre merveilleux qui a énormément ému Martine. 

Christine, une fois n’est pas coutume, va nous parler d’une BD intitulée Gaza de Mazen Kerjab. Le 7 octobre 2023, le Hamas a forcé le blocus imposé à Gaza depuis 2007 par Israël et lancé une attaque sur le territoire israélien dont le bilan sera de 1 205 morts et de 251 otages. En représailles, l’armée israélienne a envahi la bande de Gaza. Les Gazaouis ont été bombardés, assiégés, déplacés, privés de nourriture, d’eau, de soins médicaux. Entre le 9 octobre 2023 et le 1er octobre 2024, Mazen Kerbaj, artiste libanais installé à Berlin, a traduit quotidiennement, en dessins saisissants, ce qu’il recevait depuis Gaza sur son téléphone et via les réseaux sociaux. Un ouvrage très dur, mais qui reflète hélas la réalité, Christine, tout comme Martine précédemment, a des sanglots dans la voix en nous parlant de ce livre. Elle poursuit avec un sujet plus léger, mais fort intéressant, Éloquence de la sardine de Bill François. Spécialiste des animaux marins, l‘auteur nous entraîne avec simplicité et humour à la rencontre des baleines musiciennes, donne la parole à la sardine et au thon rouge, nous fait entendre la voix de l’hippocampe et le chant des coquilles Saint-Jacques. À la lumière des méduses fluorescentes aux couleurs invisibles, ce livre est une plongée dans les profondeurs de la Science et de l’Histoire, où les légendes sont souvent plus crédibles que l’incroyable réalité. Mythes, anecdotes et découvertes scientifiques nagent de concert dans ce récit, immersion onirique pour s’émerveiller et respecter cet univers insoupçonné. Christine a apprécié l’écriture et appris beaucoup de choses sur les animaux marins. Passionnant !

Nous terminons avec Jeannine qui s’est lancée dans la saga « Les 7 sœurs » que nous avons déjà évoquée plusieurs fois. Elle a trouvé le premier intéressant, ça se passe au BrésiL Elle vient de commencer le deuxième, mais elle trouve que l’écriture laisse vraiment à désirer et c’est gênant… donc elle préfère nous parler de Panorama de Lilia Hassaine, un roman policier dystopique où la France fonctionne sous un système démocratique d'un tout nouveau genre. L’action se déroule en 2049-2050, dans une ville française morcelée, où une famille a disparu. Y vivent séparément les riches, les pauvres, les marginaux, les retraités, les oisifs, les exclus. Différentes catégories sociales séparées par une zone tampon où demeure Hélène, enquêtrice et narratrice de l’histoire. La romancière mêle habilement enquête policière et critique sociale, exposant les dérives d’un monde obsédé par la surveillance et l’apparente perfection, dans une France ultra-transparente où chacun vit sous verre. C’est très bien écrit, extrêmement dérangeant et ça donne à réfléchir… 

Bernadette

                                                L’Assemblée générale aura lieu

                                  le Mardi 14 octobre 2025 à 19h à la Louisiane 

                                                      suivie du Café littéraire